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22 avril 2007 7 22 /04 /avril /2007 11:11
(INTERNATIONAL STANDARD ORGANIZATION) : On ne peut pas  étudier l'entreprise en réseau sans parler des procédures qualité. Nous nous limiterons aux procédures ISO qui sont les plus connues en France. Ce système de contrôle de la qualité rend l'entreprise fournisseur totalement transparente. Les contrats interfirmes, relevant du droit commercial, permettent de prévoir le contrôle qualité. Si bien que la maîtrise des ressources externes (achats et charges externes) s'avère parfois plus simple que celui des ressources internes. En effet, la relation externe, débarrassée des considérants humains et sociologiques propres à la relation interne de toute entreprise, rend la gestion des ressources plus « pure », plus « scientifique ». Le donneur d'ordres arrive à contrôler ses fournisseurs mieux que s'ils étaient chez lui, hiérarchiquement intégrés.L'ambition est d'arriver à une efficacité totale grâce au contrôle permanent de tous les éléments qui pourraient compromettre la réalisation des objectifs. Ce contrôle, ne peut-il pas conduire à la notion de pouvoir totalitaire ? C'est ce qui arrivera un nombre de fois important, sous couvert de la vertu « qualité » et du service au client. Le camouflage est excellent, il faut bien l'accorder. Mais cela ne change en rien la réalité.


REFLEXIONS SUR LES PROCEDURES ISO

Le mythe de la vertu et la vraie tyrannie

 Le management n'en est jamais à une volte-face près. Fin des années 80, sont apparues les procédures ISO au milieu d'édifices documentaires poussant comme des champignons et croulant sous des avalanches de papiers. Paradoxe apparent, car 10 ans plus tôt, fin des années 70 début des années 80, la mode était aux cinq zéros. Mode venant du Japon (lorsqu'il y a "cinq" le Japon n'est pas loin). La mode était donc à zéro défaut, zéro délai, zéro panne, zéro stock, et?zéro papier. Les cinq zéros, moins qu'une méthode, étaient d'ailleurs, (c'est souvent le cas au Japon) un révélateur de dysfonctionnements éventuels. Dans l'hexagone le mimétisme était de rigueur : il fallait donc lutter contre la « bureaucratie » envahissante de l'administratif dans les entreprises et, comme toujours, la presse notait : "La France est en retard". Les journaux spécialisés dans le management ne tarissaient pas d'éloges sur ces japonais qui arrivaient à communiquer et à gérer leurs affaires avec un minimum de papiers, gagnant ainsi en efficacité, en flexibilité et en réactivité. On racontait volontiers l'histoire de l'entreprise fantôme. Il s'agit d'une entreprise qui construisait des bateaux et qui, devant le succès de ses produits, avait été appelée à s'agrandir. Sa croissance s'était accompagnée de la nécessité de se doter d'une administration. L'entreprise prospérait à tel point qu'elle avait construit une tour dont plusieurs étages étaient occupés par les administratifs. Toutefois, au bout d'un certain temps, le marché devint plus difficile, si bien que l'entreprise décida que le remède consistait en une plus grande rigueur dans les procédures administratives et dans l'augmentation des contrôles sur les produits pour assurer une plus grande qualité. Les services administratifs furent donc étoffés. Peine perdue. Le nombre des bateaux allant à la mer était de plus en plus réduit, à mesure que les services administratifs grossissaient. On finit par agrandir les locaux et on construisit une seconde petite tour à côté de la première pour loger les nouveaux administratifs. Mais le surcoût engendré par toutes ces modifications obligèrent l'entreprise à serrer les prix sur les matières premières, sur les salaires, sur l'investissement, voire sur la recherche. Si bien qu'au bout d'un certain temps l'entreprise n'envoyait presque plus de bateaux à la mer. A la veille de sa fermeture les deux tours étaient peuplées d'administratifs qui passaient leurs huit heures de travail à s'envoyer des petits papiers. L'entreprise fantôme avait mangé l'entreprise réelle. Bref, telle était l'atmosphère lorsque apparut ISO, un 30 juin 1988, date à laquelle fut créée l'Association Française d'Assurance Qualité (AFAQ). 

En quoi consiste la procédure qualité ?

 Certaines entreprises exigent de leurs fournisseurs qu'ils soient certifiés ISO. Pour, rester sur le marché, les fournisseurs sont donc obligés de se faire certifier. Il n'est pas question de rendre la certification obligatoire par une loi votée par le parlement. Non, il s'agit simplement de correspondre à des normes décrétées par certaines entreprises. (Lesquelles ? Nous le verrons plus tard). Un certain nombre d'exigences sont requises pour être certifié. Tout d'abord on demande à la Direction de l'entreprise de faire une déclaration de politique générale par écrit expliquant quels sont ses objectifs et ses engagements en matière de qualité. Par ailleurs, l'entreprise doit préciser la manière dont elle s'assurera de la compréhension de cette politique par les salariés, de sa mise en ?uvre et de la manière dont elle sera entretenue. Au niveau de cet article il est inutile de préciser davantage. L'entreprise doit évidemment indiquer les différents rôles et responsabilités des personnes, identifier les besoins internes en matière de vérification, prévoir les moyens, les personnes à former, désigner un représentant de la Direction qui, à intervalles convenables, doit examiner le système qualité lui-même. Vient ensuite, l'édifice documentaire proprement dit, dont le but est de noter l'identification et la traçabilité des produits, la maîtrise des procédés, (pour éviter les déficiences ne paraissant qu'après l'utilisation du produit). ISO exige de mettre par écrit toutes les procédures d'organisation et de fabrication, de rédiger un manuel d'exploitation, des dossiers de postes, les modes opératoires, les consignes, le recueil des cahiers de consignes, le recueil des paramètres clés, etc. Il faut que les procédures dites "de qualité" ne garantissent pas la qualité du produit, mais le respect de certaines procédures. Par exemple, pour une entreprise de conseil, la procédure ne garantira pas la qualité des conseils, mais elle spécifiera par exemple que les prises de commandes ont une procédure spéciale selon qu'elles arrivent par fax, par Internet, par téléphone ou par courrier. La procédure garantira que l'entreprise fournisseur prendra contact avec le client pour négocier le domaine et la nature de l'intervention, qu'il enverra un devis dans un certain délai ; puis les procédures prévoiront une mise en forme du travail préparatoire tout en spécifiant que la commande transformée en ordre d'exécution sera établie en 4 exemplaires, un bleu, un blanc, un jaune et un vert, sans oublier de préciser où ces exemplaires seront classés, dans quelles armoires, pour combien de temps et ce qu'on en fera au bout d'un certain délai : archivage ou destruction. Les procédures couvrent l'étude, la réalisation, les modifications d'installation ; elles précisent l'état des produits à chaque étape du procédé et elles incluent les procédures concernant la formation du personnel. Pour la fabrication, il faut ajouter les procédures de contrôle et d'essai et celles concernant la maîtrise du produit non conforme. Ce qui fait pas mal de documents, car une fois toute cette procédure mise par écrit, ce qui consiste à mettre noir sur blanc tout ce qu'on fait, il y a une autre série de documents, destinés à prouver qu'on fait bien ce qu'on a écrit, et qui sont à remplir par tout le personnel au fur et à mesure de l'exécution du travail. Devant tant de papiers, il devient nécessaire d'administrer l'administration. Autrement dit, on élabore des procédures d'identification, de collecte, de classement et d'archivage des documents, de leur tenue à jour et de leur destruction (sans oublier les procédures et documents concernant les sous-traitants).  

Conséquences des procédures ISO

 Précisons qu'il n'est pas dans notre propos d'aller contre tout mouvement d'organisation et de condamner les procédures en tant que telles. Il est certain que lorsqu'une entreprise n'est pas bien organisée, qu'il n'y a aucun indicateur (par ex. nombre d'heures passées en moyenne sur des interventions, ou quantité de matière utilisée par unité de production) quand il n'y a aucune mesure, aucune traçabilité, la gestion est déficiente et les responsables gesticulent en toutes directions avec peut-être l'illusion de faire preuve de beaucoup de flexibilité alors qu'ils ne font que gérer des affaires au coup par coup, sans hiérarchie d'importance, sans pouvoir prévoir quoi que ce soit, sans aucune visibilité. L'entreprise a toujours été et doit rester un lieu où le travail est organisé.Précisons encore que les procédures donne au donneur d?ordre un recours vis à vis de fournisseurs non scrupuleux. De même, lorsqu'il s'agit d'entreprises où la sécurité est très importante (par ex. entreprises classées seveso ou entreprises travaillant avec l'atome), les procédures sont bien évidemment nécessaires et logiques, vu le contexte. Leur existence est justifiée par les conséquences incalculables que pourraient avoir les maladresses, les initiatives intempestives, les imprudences ou les négligences coupables. Mais il ne faut pas généraliser. Une pile nucléaire présente tout de même plus de risques que les fabrications de bouchons de radiateurs de voitures ou de robinets de salles de bains. Les entreprises certifiées ISO souffrent d'une inflation documentaire. Le travail de la maîtrise se passe à remplir toujours plus de papiers au détriment des conseils techniques et de l'encadrement de terrain qui devraient rester parmi les tâches primordiales de ce personnel. Ces conséquences sont-elles mineures ? Il faut y regarder de plus près.  

Examen des conséquences

 Tout le monde comprend qu'une entreprise doit travailler de manière fiable. Son produit doit pouvoir inspirer confiance. La finalité de l'entreprise est de satisfaire le client. Il est normal que l'entreprise cherche, par la qualité, à renforcer son image de marque et à préserver l'emploi. Mais il faudrait que ces critères soient atteints en renforçant le sens du métier et la conscience professionnelle chez les opérateurs responsables. Qu'en est-il ? 

Diminution ou disparition du sens moral

 En raison des procédures, la qualité se met en place à travers un dispositif administratif contraignant ; l'aspect bureaucratique et paperassier prend le dessus ; on perd de vue le côté créatif du travail. L'apport de l'homme est problématique. Allant d'entreprise en entreprise nous avons trop souvent entendu : "On est mis dans des cases ; nous sommes devenus des entités interchangeables". Ou encore plus grave : "Je sais que la procédure est fausse, mais je ne le dis pas, sinon le Directeur de production ne serait plus d'accord avec moi, car il ne jure que par la procédure". Ou encore, nous nous rappelons la remarque amère d'un responsable d'atelier nous disant : "Depuis qu'on est sous les procédures ISO on ne sort plus le produit à temps".  Explication : plus il y a de règles externes, plus il y a de garde fou, moins les gens se sentent responsabilisés et moins ils mettent de normes dans leur propre conscience. Ou bien les personnes intériorisent des normes et des règles de travail et les choses vont bien ; ou bien les règles sont externes et il y a davantage de laisser-aller, chacun s'en lave les mains. La procédure remplace la conscience professionnelle, la jugeote, la communication entre les hommes. Les responsables ne prennent plus de risques. Ils appliquent les procédures. L'homme ne compte plus. Loin d'être un facteur de progrès moral, les procédures engendrent morosité, lassitude, et suscitent des comportements négatifs. De même qu'autrefois le travail à la chaîne a produit les grandes masses ouvrières anonymes et syndiquées, de même la bureaucratie "qualiticienne" fragilise l'entreprise. Avec les procédures ISO, l'excès de zèle est le moyen le plus simple de paralyser la production. Exemple de comportement déviant : un de mes collègues (et ami) était en mission dans une entreprise et devait commencer assez tôt le matin. Il commençait toujours la journée en allant voir les maîtrises déjà en poste. Il regarde un jour ce qu'ils étaient en train de faire et leur pose la question : ces papiers que vous remplissez sont les documents correspondant à la fabrication d?hier ? - Réponse des maîtrises : Non, c'est la fabrication d'aujourd'hui.- Mon collègue : Comment est-ce possible, puisque la journée est à peine commencée ?- Un maîtrise : On préfère remplir le matin en arrivant. Comme ça, on peut partir à l'heure le soir !- Mon collègue : Mais si ce que vous remplissez ne correspond pas à la réalité ?- Le maîtrise : L'important, c'est que la production sorte et que les quotas soient respectés. Maintenant, si on note tous les aléas de production, les bureaux vont demander des tas d'explications. On ne s'en sortira pas.  D'aucuns pensent peut-être que notre exemple décrit des agents de maîtrise particulièrement lamentables ? Il n'en est rien. Il s'agit d'agents de maîtrise qui redoutaient par-dessus tout que les procédures leur compliquent la vie et qui attendaient que l'organisation la leur simplifie.  Le vrai est que l'excès de procédures dépersonnalise le travail. Cette dépersonnalisation engendre, d'une certaine façon, l'anonymat, la non-implication, l'indifférence, voire la triche. Puis la méfiance fait son apparition. Devant le désengagement et les comportements plus ou moins frondeurs, l'entreprise aura malheureusement tendance à renforcer les procédures et les contrôles. C'est le cercle vicieux. Il ne faut pas dépersonnaliser un peu plus le travail, il faut au contraire le rendre plus personnel afin de donner aux gens, avec la faculté d'initiative, une responsabilité réelle, le sens du métier. Nous connaissons certains professionnels de la qualité qui s'insurgeraient à la lecture de cet article et qualifieraient nos réflexions de "trop hâtives" et de parti pris. Ils nieraient en bloc les inconvénients des procédures. Sans rire, ils nous feraient remarquer qu'un système qualité prévoit des procédures pour changer de procédures et que l'initiative reste toujours permise, voire réclamée. A les entendre, l'homme reste "acteur". Ce n'est pas notre expérience. Dans l'immense majorité des cas, les procédures sont un frein. Pour la simple raison que personne n'a envie de remettre en cause ce qui a coûté des milliers d'heures de travail et pour les entreprises moyennes environ 1 million de francs (150.000 euros), car tel est le prix moyen d'une certification valable uniquement trois ans. Un agent de maîtrise n'a pas souvent l'autorité nécessaire pour dire à son administration, devenue bien impersonnelle, qu'il faut changer les procédures sur tel et tel aspect. Tout le monde est conscient du problème, et sans que cela soit un comportement universel, dans beaucoup d'entreprises on attend que l'autre prenne l'initiative de changer la procédure, auquel cas tout le mode en profite pour faire changer ce qui lui paraît nécessaire ; c'est ainsi que celui qui a pris l'initiative de faire changer une procédure peut se retrouver avec plusieurs semaines de travail pour mettre au point de nouvelles procédures satisfaisant tous les desiderata. 

Diminution ou disparition du rôle hiérarchique

 Autre inconvénient, la qualité transforme essentiellement l'activité d'encadrement en procédure de contrôle des personnes. Il peut sembler que les procédures qualité permettent de sortir des produits qui fonctionnent bien tels que des voitures nouvelles, des presses plus performantes, etc. On pense aussi que les fournisseurs qui en prenaient trop à leur aise sont maintenant contraints à plus de sérieux. Tout cela n?est pas faux. Le contrôle a toujours existé et existera toujours. Mais, ce qui est en question, c?est le rôle central qu?il joue. C?est son extension à tous les niveaux. On en retire l'idée que la qualité s'obtient grâce au contrôle ; alors que, en vérité, la qualité s'obtient par l'effort et l'intelligence dans la recherche, par le savoir-faire et le professionnalisme dans l'exécution et par la conscience professionnelle de tous. Autant de choses qui ne se mettent pas en procédure : le contrôle n'a jamais été un moteur. Par contre la compétence du personnel, sa capacité à travailler en équipe, à se faire profiter mutuellement des trouvailles des uns et des autres, l'envie de bien faire ne sont pas mesurables, ne peuvent pas se traduire dans des procédures. C'est pourtant là que réside le véritable moteur de la qualité. En chimie il y souvent des variations imprévisibles de la matière qui peuvent être corrigées par le savoir-faire des ingénieurs en dehors de toute procédure. Par exemple pour obtenir une certaine qualité de verre, c'est à la suite de nombreuses années d'expérience que l'ingénieur saura quel produit ajouter dans le four pour arriver aux spécifications recherchées. L'homme d'expérience sait que ce qui est mis dans les procédures suppose que les choses se réalisent toujours de la même manière. Or, très souvent, le vécu professionnel démontre qu'il n'en est rien.Bien avant ISO, l'entreprise avait déjà l'expérience de l'écart plus ou moins grand existant entre un travail prescrit dans un bureau d'étude ou un bureau des méthodes et le travail réalisé en production. Tout le monde sait que le planning prévu la veille risque d'être chamboulé le matin dès la prise du travail par des tas d'imprévus. Tout le monde sait que la meilleure manière de bloquer un système, c'est d'automatiser à la fois la prévision et l'exécution. Le militant ISO répondra imperturbable que les systèmes qualité doivent prévoir des procédures en cas d'imprévus. On n'en sort pas.     

Taylor is back !

 Il faut bien noter que les procédures ISO marquent un retour à la mentalité tayloriste.1°) En concevant en amont une organisation intangible et en aval une exécution, on reconstitue la fracture conception / organisation d'un côté, exécution de l'autre, même si, dans la phase amont, on a soi-disant associé le personnel.2°) Retour au taylorisme, par le fait que la hiérarchie est de nouveau une simple hiérarchie de contrôle et de surveillance, dépourvue de pouvoir de décision. La procédure décide, le responsable, non.3°) Retour au taylorisme par la dépersonnalisation du travail. L'homme, obligé de suivre strictement et d'une manière répétitive les procédures, ne fait plus un travail personnel. Son ?uvre ne lui appartient plus et beaucoup de problèmes touchant à la démotivation trouvent ici leur source. Nous nous rappelons le témoignage de ce technicien supérieur nous disant : "Dans mon entreprise le patron nous a dit : Je ne veux plus qu'un seul projet puisse être identifié par le nom de quelqu'un". Mais comme la traçabilité est partout on saura identifier qui, à quelle heure et sur quel poste, a fabriqué tel produit défectueux. Le système qualité marchera pour relever toutes les anomalies. Il n'est pas prévu qu'il fonctionne dans le sens inverse. La rédaction des procédures tend à transformer le travail en un programme d'ordinateur avec tous les risques de "plantage" qui l'accompagnent. Non seulement beaucoup de travaux perdent tout intérêt pour l'opérateur, mais cet abus paperassier et tatillon interdit tout apport de soi, toute improvisation, toute créativité. 

Diminution ou disparition de la propriété de métier

 Autre conséquence : quid du secret de fabrication ? Telle grosse entreprise fabricant des voitures envoie à titre plus ou moins permanent chez un fabricant de ressorts pour amortisseurs un technicien chargé de contrôler sur place le respect des procédures de son fournisseur. Il a le droit de regard sur tout, il connaît tout. Un fabricant de voiture n'a pas qu'un seul fournisseur. Qui l'empêche de réclamer à un fournisseur B l?application de certains procédés employés par un fournisseur A, au nom de l?impératif d?avoir les mêmes garanties ? Il peut signifier au fournisseur de nouvelles exigences, à propos de la matière première, de son traitement (température de four, temps de cuisson, mode de refroidissement), etc.? Le fournisseur A voit ainsi son savoir-faire transiter chez son confrère B. La raison du réseau est toujours la meilleure. Parfois, on organise même, entre membres d?un même réseau, des séances de réflexion et d?échanges « des bonnes pratiques ».  La petite entreprise perd le secret de fabrication mais la grosse entreprise risque aussi de perdre le métier parce qu'elle a de plus en plus recours à la sous-traitance. Exemple, chez Thomson, dans certains secteurs, quasi toute la production est externalisée, l'emboutissage chez Renault, la fabrication de pylônes à EDF, ainsi que la révision des arrêts de tranches dans les centrales nucléaires.  Le métier disparaît également dans la petite entreprise sous-traitante, où la grosse entreprise impose un contrôle à la petite et où l'homme de métier est transformé en exécutant. L'expérience et la compétence de l'homme de métier sont remplacées par la procédure. Ici encore, on peut noter que la vie morale nécessaire dans la profession comme partout ailleurs, est niée et transformée en une vie purement technique et mécanique. En conclusion l'idée fondamentale demeure la restauration de la notion de métier. Celui qui a un métier est responsable. Il apporte sa caution, il édicte ses règles, il est propriétaire de ce qu'il fait parce qu'il est maître de ses initiatives. La vie morale au travail (où est le mal ? Où est le bien ?), ne peut exister sans la responsabilité et la responsabilité ne peut exister sans la notion de métier. L'homme soumis aux procédures est un homme technique, faisant partie d'un système technique, qui ne se détermine en rien, n'ayant aucune initiative ni point de vue personnel. Il en arrive à se comporter, tout comme un ordinateur, comme un être parfaitement amoral.

(Fin de la première partie)

Antoine Marie Paganelli

 

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  • La politique est refoulée par les mêmes causes qui ont éliminé la religion. Dès lors, que reste-il de la société ? La science ? Mais la science ne donne aucun sens aux actes humains. Il est urgent de retrouver la mémoire de ce que nous sommes
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