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2 janvier 2014 4 02 /01 /janvier /2014 21:47

Le titre de cet article fait référence aux quatre évêques sacrés par Mgr Lefebvre en 1988. Mais pour le vingt-cinquième anniversaire, ils n’étaient plus que trois, Mgr Fellay ayant réussi  à expulser Mgr Williamson. VINCENT LHERMITE, dans le corps de l’article, analyse la déclaration des trois évêques restants. 
Hugo Clementi

 

Ils étaient quatre…

Introduction

Le 27 juin 2013, à l’occasion du vingt-cinquième anniversaire des sacres épiscopaux que Mgr Marcel Lefebvre a faits le 30 juin 1988, les 3 évêques membres de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie-X (FSSPX) ont signé une déclaration lue par l’un d’entre eux.

La déclaration

Si le principe d’une déclaration à cette occasion ne fait pas discussion, le contenu a suscité de vives interrogations et des polémiques. Qu’en est-il ? Une comparaison pourra nous éclairer.

L’apport

Quel est l'apport particulier du concile Vatican II ? Il n'a pas développé la foi, il s'est contenté de reprendre des vérités déjà définies mais il y a mêlé des erreurs, c'est là sa note distinctive, c'était là sa raison d’être.

Qu'apporte de nouveau la déclaration de 2013 par rapport à celle que fit Mgr Lefebvre le 21 novembre 1974 par exemple ? Plusieurs ambiguïtés et une nouveauté. Nous passerons sur la plupart des premières pour nous concentrer sur le point 11 où est évoquée une entente possible avec Rome soit par le retour non équivoque de celle-ci à la tradition, il faudrait alors parler de conversion, rien de nouveau ici ; soit par la reconnaissance unilatérale que Rome ferait de la FSSPX telle qu’elle est, avec la prédication intégrale de la foi et le droit et le devoir de condamner les erreurs et les fauteurs d’erreurs quels qu’ils soient. C'est cela qui est nouveau et c'est là probablement sa raison d’être.

Les deux Rome

Mais tout d’abord, de quelle Rome s’agit-il ? La déclaration ne fait pas de distinction, n’évoque pas même cette possibilité qu’il y ait deux Rome. Il faut donc en conclure qu’il n’y en a qu’une. En son temps, Mgr Lefebvre ne voulait pourtant pas confondre la Rome éternelle maîtresse de sagesse et de vérité qu’il a toujours servie et la Rome de tendance néo-protestante et néo-moderniste qu’il a toujours combattue. Cette absence de distinction fonde une ambiguïté qui a des conséquences bien désastreuses.

La seconde hypothèse

Pratiquement, cette confusion des deux Rome justifie la seconde possibilité. En effet, l’explication que la hiérarchie de la Fraternité donne est la suivante : si le pape reconnaissait ainsi la FSSPX, cela signifierait qu’il n’est plus moderniste. Cependant, il se pourrait qu’il soit trop faible et isolé parmi une hiérarchie conciliaire qui, elle, ne serait pas convertie, pour remettre les choses en ordre dans l’Église. Il aurait donc besoin d’aide pour opérer la restauration.

Au passage, on notera tout de même que la déclaration dit dans les deux hypothèses « Rome » et que l’explication que donne la voie hiérarchique dit « le pape » pour la seconde hypothèse. Il se produit un glissement sémantique entre la déclaration et l’explication de celle-ci.

Dans la première hypothèse non seulement le pape mais encore toute la hiérarchie se convertit. Dans la seconde, le pape n’est plus moderniste mais faible et isolé. Nous serions donc en présence d’un pape pas assez fort pour imposer la foi à l’Église militante mais qui le serait assez pour lui imposer la FSSPX. C’est une explication qui laisse dubitatif mais dont on comprend l’intérêt si les dirigeants de la FSSPX envisagent à plus ou moins brève échéance un accord avec Rome qui tiendrait toujours, et plus que jamais, au concile Vatican II.

Portée de la seconde hypothèse

Tôt ou tard, cette seconde hypothèse paraîtra même plus raisonnable, plus prudente, plus sage que la première car, même si, Dieu étant tout-puissant, il peut convertir tout le monde d’un coup, habituellement, il ne procède pas ainsi. La conversion du pape faible et isolé qu’il faudrait soutenir prend donc dans cette optique une place de choix pour les perspectives futures. Elle serait finalement la marque d’une clairvoyance exceptionnelle de chefs qui auraient reçu une assistance toute particulière. C’est sans doute là qu’il faut trouver les signes de la Providence évoqués au début du point 11, signes difficiles à comprendre, que seule une grâce d’état insigne permet de connaître, d’où la confiance qui est exigée sans explications convaincantes pour éclairer l’intelligence.

Vers d’autres horizons

Cette déclaration permet ainsi, par cet acte solennel des trois évêques, de faire évoluer la position officielle de la FSSPX qui passe de “pas d’accord pratique sans accord doctrinal préalable”, principe arrêté par le Chapitre Général de 2006, à “accord pratique possible mais à six conditions dont trois souhaitables” comme l’a décidé le Chapitre Général de 2012, pour arriver à cette seconde hypothèse en 2013 qui est l’unique nouveauté et qui, partant, est l’élément fondamental et le ferment de cette déclaration solennelle.

La prédication de la vérité

Quant à prêcher la vérité et condamner les erreurs, tous ceux qui ont signé des accords avec la Rome actuelle après lui avoir résisté - j'écris bien tous ! - ont obtenu la possibilité d'agir ainsi et tous sont tombés. Qu’affirmait donc Dom Gérard Calvet OSB de l’abbaye Sainte-Madeleine du Barroux dans le journal Présent du 18 août 1988 ?

« Nous avons mis à la signature de cet accord deux conditions :

.  Que cet événement ne soit pas un discrédit porté sur la personne de Mgr Lefebvre : cela a été dit à plusieurs reprises au cours de notre entretien avec le cardinal Mayer, qui a acquiescé. D’ailleurs, n’est-ce pas grâce à la ténacité de Mgr Lefebvre que ce statut nous est octroyé ?

.   L'église conciliaire n'est pas la voix de notre pasteur, nous n’avons rien à faire avec elle ni avec ceux qui, même de cœur, s'attachent à elle.

 

Les mots sont clairs, les conséquences aussi : en 1993 le Barroux a accepté le Catéchisme de l’Église catholique comme étant une magnifique synthèse du magistère de l’Église incluant le concile Vatican II ; en 1995 Dom Gérard Calvet a concélébré la messe dans le nouveau rite.

Prudence surnaturelle

Cependant, on pourrait objecter que le Barroux, comme la Fraternité Sacerdotale Saint-Pierre, n’avait pas d’évêque alors que la FSSPX en compte trois parmi ses membres, et cela change tout. C’est vrai pour ces communautés mais faux si l’on considère l’Union Sacerdotale Saint-Jean-Marie-Vianney de Campos au Brésil, qui a eu pour fondateur Mgr Antonio de Castro-Mayer, et qui a signé un accord avec Rome alors qu’elle comptait en son sein un évêque, Mgr Licinio Rangel, et qu’elle a obtenu le sacre épiscopal de l’un de ses membres, le Père Fernando Aréas Rifan. Cela ne l’a pas empêché de dévier.

Les dirigeants et les membres de ces communautés seraient-ils tous des faibles ? N’avaient-ils pas la foi, la ferme volonté et la profonde conviction, certes candide, de pouvoir mener le bon combat malgré vents et marées en étant soumis à la hiérarchie ? Les faits montrent qu’ils n’ont pas été prudents. L’autorité vient-elle d’en haut ou d’en bas ? D’en haut, bien sûr. Il est donc dans l’ordre des choses que ce soit les supérieurs qui influencent leurs subordonnés et non l’inverse. Tout accord juridique avec la l’église conciliaire ferait d’elle le supérieur qui influerait son esprit dans ses subordonnés nouveaux venus.

Condamnations des erreurs

De plus, alors même qu'aujourd'hui, rien ne lie la FSSPX à Rome, les condamnations des erreurs doctrinales et des fauteurs d’erreurs se font rares ou sont très édulcorées, fera-t-on preuve de plus de fermeté quand le lien juridique existera ? Comment pourrait-on y croire ? Aujourd’hui, plus de condamnations pour être acceptés, demain, plus de condamnations pour être gardés. La crainte d’être parias aujourd’hui sera remplacée demain par celle d’être sanctionnés. La FSSPX le dit haut et fort, elle est au service de l’Église pour l’aider à retrouver sa tradition. Mais pour cela il faut avoir de l’influence et comment en avoir quand on est sanctionné ?

 

La vérité et l’opinion

Il n’est pas même possible de dire que cette déclaration est bonne sous prétexte qu’elle pose comme condition la prédication de la foi avec la condamnation des erreurs et de leurs fauteurs et non pas seulement la possibilité de critiquer le concile, avec l’acceptation implicite que cette formule comporte. Admettre cette reconnaissance unilatérale entraînerait de fait l’intégration dans le panthéon des expériences religieuses et des formulations de fois, même en déclarant haut et fort le contraire. La vérité devient objectivement une simple opinion.

Mgr Lefebvre

Pourquoi alors n’avoir pas repris la déclaration de Mgr Lefebvre de 1974 puisque rien n’a changé, sinon en pire. Tout au plus, aurait-on pu l’introduire par un paragraphe pour dire justement cela et en profiter pour rendre hommage et remercier Mgr Lefebvre. Sans doute parce que la FSSPX dans ses dirigeants souhaitent changer de stratégie par rapport au fondateur et qu’il est mal aisé de le faire en mettant celui-ci en avant.

Pourtant, Mgr Lefebvre n’est-il pas cité dans cette déclaration aux points 2, 10 et 12 ? Certes et nous nous en réjouissons mais nous constatons que les citations choisies ne font pas état des propos dans lesquels il distinguait justement les deux Rome. C’est là pourtant qu’est l’explication lumineuse de sa position prudentielle. L’église conciliaire n’est pas l’Église catholique.

Mgr Williamson

Ne tenons-nous pas dans ce refus de distinguer les deux Rome, la véritable raison de l’exclusion de Mgr Richard Williamson du Chapitre Général de 2012 puis de la FSSPX ? Il n’a jamais caché son opposition à tout rapprochement avec la secte moderniste et rien n’a pu le faire changer. Cette persévérance lui a valu d’être considéré comme un sujet manquant à l’obéissance alors que sa position est toute de foi. Sa fermeté n’ayant pu être vaincue, il a été chassé pour sa fidélité comme son père dans l’épiscopat.

Conclusion

Que les supérieurs de la FSSPX fassent ce qu'ils veulent. Nous avons suivi Mgr Marcel Lefebvre parce que sa voix était l’écho du magistère de l’Église, de l’évangile, parce qu’en lui nous reconnaissions le bon pasteur : le pasteur connaît ses brebis et les brebis connaissent leur pasteur, elles écoutent sa voix. L'église conciliaire n'est pas la voix de notre pasteur, nous n’avons rien à faire avec elle ni avec ceux qui, même de cœur, s'attachent à elle.

Vincent Lhermite


Jn. X, 14 et s.    

On voit ici tout le problème que pose l’absence de distinction des deux Rome.

Il s’agit d’un Chapitre Général électif, il doit non seulement désigner le Supérieur Général mais aussi définir ou confirmer les orientations générales de la Congrégation.

Ce qui revient à ne fixer en réalité que trois conditions, dites sine qua non, et ce, sans en avoir l’air. Voici ces trois conditions incontournables : La prédication de la foi et la condamnation de l’erreur, l’usage exclusif de la liturgie de 1962, un évêque.

Il s’agit d’un Chapitre Général de gestion qui a lieu à mi-mandat pour dresser un premier bilan, il n’a aucune portée décisionnelle.

Jn. X, 14 et s.

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13 juillet 2013 6 13 /07 /juillet /2013 18:23

La nouvelle a été révélée par l’abbé Girouard, dans son sermon du 2 juin 2013.Ce prêtre canadien, résistant au vent de ralliement qui balaie la FSSPX, a rendu compte d’un fait important expliquant la nouvelle attitude de Menzingen vis-à-vis de la Rome conciliaire. De quoi s’agit-il ?


En octobre 2012, notre abbé se plaint à son Supérieur, l’abbé Wegner, de voir la Fraternité amoindrir, voire abandonner la lutte contre Vatican II et contre les erreurs qui en sont issues. Quelle ne fut pas sa stupéfaction lorsque le Supérieur lui répondit en substance: C’est exact, mais c’est une bonne chose ! J’en suis d’ailleurs un peu responsable. L’Abbé Wegner explique alors : « quand j'étais Supérieur de District en Hollande j'ai rencontré et suis devenu l'ami du Président d'une société de conseil...Par la suite j’ai demandé à cet ami de faire le "marquage", le "branding" de la Fraternité, car la société de cet ami est en effet spécialisée dans le branding."

Branding-copie-3.jpg
Un mot d’explication sur ce vocabulaire barbare. A quoi sert le branding ? Ce terme, emprunté à l’élevage, désigne d’abord l’action de marquer au fer rouge les animaux, afin de faire connaître leur propriétaire. Appliqué à une entreprise, le branding est censé aider à se positionner sur le marché, à mieux faire valoir sa spécificité et à se démarquer de ses concurrents. Cette opération, censée faire le management de la marque, consiste à évaluer le delta entre une institution telle qu’elle souhaite paraître devant le public et la manière dont elle est perçue. Cela suppose une enquête d’opinion auprès des clients et des non-clients, portant sur les points forts et sur les points fa
ibles, afin d’évaluer l’image de marque. Puis l’on décide des changements à apporter dans l’institution pour mieux faire coïncider son image avec ce que l’on souhaite.

 

les-gens-disent.jpg

L’Abbé Wegner joue ensuite les intermédiaires auprès de Mgr Fellay qui donne son accord pour la mission de conseil. Censé répéter tel un perroquet les dires de l’opinion, l’homme d’affaires rédige son rapport sur la FSSPX. Selon lui, la Fraternité fait fausse route depuis le début … Son image de marque est tellement négative que jamais le public ne sera attiré. Elle est vouée à la stagnation, voire au déclin. L’argument dirimant de la société-conseil, selon l’Abbé Girouard, est peu ou prou le suivant : « L'Église de Vatican II est comme un vieil homme mourant, elle est comme un mourant étendu dans la rue, comme ça: Ils perdent leurs séminaires, ils perdent leurs monastères, ils vendent leurs églises ; c'est une Église moribonde. Et vous avez vraiment une mauvaise image lorsque vous continuez à combattre cette Église. Vos critiques vous font paraître cruels, comme si vous exagériez. C’est comme  nouvelle image de marque doit changer complètement. Vous devez arrêter de discuter à coup d’arguments ; vous devez cesser le combat. Vous devez plutôt vous concentrer sur le côté positif, et montrer la beauté de la liturgie traditionnelle, la beauté de la théologie traditionnelle, et de cette façon, on ne vous  percevra plus comme des gens cruels, amers ou comme des êtres de ce genre."[2]

 

Ce domaine du conseil, on l’aura remarqué, évolue, par construction, au niveau de l’opinion, du ressenti, du vécu des uns et des autres. La subjectivité tient lieu de réalité indépassable. La Fraternité a voulu se regarder dans le miroir de l’opinion. Pour quelles raisons ? Par inquiétude ? Par souci pastoral ? Pour mieux convertir les âmes ? Ne sait-on pas que c’est la Grâce qui convertit, que la sainteté attire la Grâce et non toutes ces histoires d’image de marque ? Saint Paul, saint Dominique ou saint François Xavier se souciaient-ils de leur image de marque ? L’esprit mondain se manifeste souvent en ceci que l’on supporte mal d’être snobé par le monde. Hélas ! Mgr Fellay a prêté l’oreille aux sirènes de la renommée. S’est-il interrogé sur la pertinence des méthodes d’une société de conseil chargée d’évaluer la valeur d’une marque sur le marché, avant de les appliquer à la société de prêtres dont il est responsable?

Quoi qu’il en soit, Menzingen se voit embarqué sur les chemins de la subjectivité où la perception de l’autre est plus importante que ce que l’on est, où l’opinion du public joue un rôle plus déterminant que ce que l’on fait. La messe de toujours, les sacrements, dont la Grâce découle du Sacrifice de la Croix, la lutte contre le modernisme sont réévalués à l’aune du qu’en dira-t-on.


Ce qu’on appelle le « value based management » ou «Management par les valeurs»


Mgr Fellay veut depuis fort longtemps un rapprochement avec Rome. Ce qu’il souhaite va donc dans le même sens que les conclusions de la société de conseil : faire taire les critiques et se concentrer sur le positif : la liturgie, la doctrine. Le consulting n’a donc pas été l’élément déclencheur, mais a servi de confirmation. La « science managériale » n’a fait que corroborer les analyses du prélat : un changement de cap est nécessaire.

Mais ce changement de cap représente plus qu’un simple réajustement. Il comporte un véritable désarmement spirituel, une abdication, une attitude d’acceptation ou d’indifférence envers ce que la Fraternité a combattu depuis plus de quarante ans …

Restons sur le plan du diagnostic d’entreprise, choisi par Mgr Fellay. Qu’en disent les managers ? Sur le plan de la psychologie de groupe, ils proposent une analyse propre à fabriquer un modèle manipulateur où l’on distingue la culture de l’éthique

Yvon Pesqueux et Yvan Biefenot analysent la culture d’entreprise et l’éthique d’entreprise. Rien de plus légitime en apparence. Selon nos deux auteurs, la culture et l’éthique font certes référence à un modèle de croyances et de valeurs, mais l’un ne peut se confondre avec l’autre. La culture relève des données sociologiques par lesquelles chacun s’identifie. Elle suppose une stabilité, une tradition constituant le ciment social. Le fonds commun des relations entre les parties prenantes de cette même culture permet reconnaissance mutuelle et solidarité. En période de crise, quelques valeurs enfouies refont surface et assurent une meilleure unité des consciences et des mœurs. La culture donne à l’entreprise sa spécificité, sa forme, son essence.Value-based-management-copie-2.jpg

En quoi consiste la manipulation ? En ceci : « l’éthique » se situe davantage dans la préoccupation de la vie quotidienne et de la survie. Elle concerne la stratégie et la tactique. L’éthique couvre le champ pratique de l’action.

L’éthique peut entrer en conflit avec la culture. Comment se présente une telle éventualité ? La déchirure vient de l’extérieur, de l’adversité, du monde qui bouge et qui pose à l’institution la question de sa survie. Le monde des affaires pense que, pour avoir une culture, encore faut-il exister. Etant persuadée que l’existence précède l’essence, l’entreprise préfère « l’éthique » tournée vers l’avenir, à la « culture » accusée de rigidité et d’inadaptation. Il ne faut pas chercher ailleurs la raison des restructurations permanentes, de la disparition des métiers, de la mentalité évolutionniste amoureuse par principe de tout ce qui est nouveau.

Opposer la culture d’une institution à l’éthique de son action, c’est réputer la culture actuellement dénuée de fondement rationnel. On la prive arbitrairement de justifications autres que sentimentales, tout en accordant les vertus salvifiques à l’éthique, toute entière tournée vers la vie et vers l’excellence … Voilà pour la manipulation.

Néanmoins, les consultants d’entreprises le savent : imposer la prépondérance de la présumée « éthique » sur la culture n’est pas une opération se déroulant comme sur un long fleuve tranquille. La nature réagit. C’est à la culture que sont attachés la plupart des salariés. Pour quelles raisons ? Parce que cette culture représente la loi et que cette loi est connue. Il n’en va pas de même pour l’éthique, entrée en conflit avec la culture pour cause de passéisme. L’ensemble du personnel voit ce changement d’un mauvais œil. Non pas seulement, comme on l’entend souvent dire, par attachement paresseux aux habitudes, ou encore par la peur irraisonnée de l’inconnu. Ce qui suscite les craintes et les oppositions du personnel, c’est le désordre moral qu’engendre le changement des fondamentaux : la non reconnaissance des vertus acquises, la remise en cause du mérite, l’oubli des services rendus, l’abandon obligé des valeurs jusqu’ici en vigueur. C’est la création d’une situation d’injustice. Dès lors, l’entreprise court le risque de passer pour cynique. D’où le recours au terme d’éthique. Le vocabulaire est important, car il conjure l’accusation d’immoralisme. C’est pourquoi une nouvelle hiérarchie de « valeurs » devra accompagner le changement. C’est ce qu’on appelle le « management par les valeurs ».

 

Conséquences relationnelles et morales

Le changement de culture reste, pour une entreprise, une opération à haut risque. Les spécialistes s’accordent sur ce point. Ecoutons ce qu’en disent les professeurs de HEC de Montréal :

« Le changement culturel peut engendrer des comportements agressifs et opposés à l’idée même du changement. Beaucoup de pays et d’organisations en ont fait la douloureuse expérience. Ainsi, une des raisons les plus probables de la grande débâcle qui a emporté la société Béatrice est précisément la remise en cause de la culture quasi-spartiate qui y régnait jusqu’à la fin des années 70 (Hafsi, 1980) De même les difficultés et les soubresauts connus par beaucoup de pays en développement peuvent être reliés à la brutalité des changements culturels qui s’y sont produits. (Kiggundu, Jorgensen & Hafsi, 1983) »

Pour faire face à la grogne, la direction procède alors à quelques mutations, favorise la promotion-récompense des dociles, met les autres au placard, voire licencie les fortes têtes « psychorigides » dont on doit – bien à contrecœur, croyez-le ! - se séparer.

Une mentalité de circonstance, assez neutre, fait son apparition. Elle tient lieu de sagesse. À l’exclusion, la majorité préfère l’institution, quelle qu’elle soit. Le plus grand nombre ne défend ni la culture ni l’éthique, mais une convention assez molle, sans odeur ni saveur. C’est plus malin. On ne plaint pas les opposants sanctionnés : ils ont récolté que ce qu’ils méritaient. On va jusqu’à leur en vouloir d’avoir critiqué le patron, d’avoir mis en danger la solidité de l’entreprise. L’existence de l’institution passe avant sa finalité. L’existence précède l’essence. Il en résulte une chute vertigineuse de la moralité. Le manque de solidarité des membres de l’entreprise pose rapidement un problème. La concurrence interne des salariés remplace le désir de bien faire ; elle n’apporte d’ordinaire aucune plus-value, mais au contraire rétention d’information et divers blocages. L’investissement personnel de chacun s’en ressent.

 

Le monde de la religion et le monde des affaires.

Ce qui présente un risque important pour l’entreprise n’a vraiment aucun sens pour une institution religieuse catholique dont le fondement est la Foi catholique. Pour diverses raisons, dont la principale est que le surnaturel n’est pas fondé sur les mêmes principes que le monde naturel. Développons ce constat plus en détails.

Les conclusions du cabinet-conseil néerlandais concernent le comportement des non-clients de la FSSPX, car ceux qui suivent cette institution ne sont pas révulsés par les critiques adressées à la Rome conciliaire. Lorsqu’on cherche à gagner des parts de marché, autrement dit, lorsqu’on veut se tourner vers les non-clients, Peter Drucker dans Managing for résults, livre culte toujours d’actualité, pose d’abord le dogme que le client n’achète pas un produit, mais une satisfaction (toujours ce subjectivisme !). L’auteur incite ensuite à se poser plusieurs questions dont les plus importantes sont les suivantes : Qui est le non-client, alors qu’il fait potentiellement partie de la cible ? Pour quelles raisons ne franchit-il pas le pas ? Et subséquemment : « Quoi modifier pour arriver à produire les satisfactions qu’attend le client ? » Ces questions, et la pensée profane allant avec, ont infesté Menzingen.

On sait que les « non-clients » de la FSSPX ont peur du schisme. Ils aiment la liturgie traditionnelle, mais ils estiment la Fraternité, sinon hors de l’Eglise, du moins en désobéissance aux autorités légitimes. Ce qu’ils veulent, c’est le certificat de conformité, dûment délivré par les autorités compétentes. Selon eux, l’autorité visible a raison. La théologie s’arrête là. Ils ne s’interrogent plus sur la Foi de l’Eglise : le Pape suffit à faire le vrai, quoiqu’il dise, quoiqu’il fasse. Faut-il donner un exemple ? Jusque sous Pie XII, l’Eglise s’efforçait de mettre en garde contre les fausses religions. Aujourd’hui, les rassemblements d’Assise, impensables encore sous le Pasteur angélique, passent pour de beaux gestes de Charité. Le grand nombre accepte sans broncher: la structure a toujours raison. Peuples, battez des mains !

Or, pour des raisons de Foi, on ne peut pas marier la liberté religieuse avec le credo catholique, ni mettre la liberté humaine au-dessus de la Révélation, ni admettre plusieurs « vérités » dissemblables, etc. En un mot, il est impossible d’accepter le magistère de la Rome actuelle. On ne peut donc pas satisfaire les attentes des « non-clients » sans devenir comme eux, c’est-à-dire sans devenir des positivistes, suivant inconditionnellement la structure visible « Eglise » sans se demander si elle reste fidèle à sa finalité.

Conclusion

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, le malaise de la Fraternité est patent. Mgr Williamson a été exclu, les opposants sont diabolisés.

L’atout majeur de Mgr Fellay est de pouvoir de muter l’un, de sanctionner l’autre, d’interdire la publication de tel article ou de favoriser la promotion de tel prêtre particulièrement docile.

De la motivation fondée sur la Foi et le zèle ardent pour la défense de la Foi, on passe graduellement à la motivation fondée sur la peur. Tout commençait par la recherche du Règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ ; tout continue maintenant par l’application du Branding et la flagornerie qu’il entraîne.

Beaucoup de prêtres se taisent et attendent de voir ce qui va se passer. D’autres font remarquer leur orthodoxie par les critiques qu’ils adressent à leurs anciens collègues (tels l’abbé Laisney se chargeant de « réfuter » l’abbé Chazal, ou l’abbé Bouchacourt, conspuant Mgr Williamson pour avoir osé venir au Brésil donner des confirmations dans une congrégation ne faisant pas même partie de la FSSPX.). Prions pour tous ces prêtres.

Nous convenons volontiers que cet article ne répond pas exhaustivement aux questions que soulève le recours au Branding pour définir la stratégie de la FSSPX. M. L’abbé Girouard a tout de suite vu le côté dérisoire et navrant de cette démarche. « Et dire que c’est nous qu’on accuse de manquer d’esprit surnaturel ! » dit-il avec étonnement.

Certes, pour orienter la Fraternité, n’aurait-il pas été plus judicieux d’avoir recours à la pensée du fondateur, Mgr Lefebvre ? « Aucune compromission avec le modernisme ! Tout pour le Christ Roi ». Mgr Fellay s’apercevra sans doute un jour qu’il a ruiné l’œuvre de Mgr Lefebvre en préférant les sirènes de l’éthique des affaires à l’élan surnaturel du missionnaire poussé par l’amour du Christ-Roi, en accordant trop d’importance au souci mondain du « paraître » ou du « qu’en dira-t-on » et en oubliant « la folie de la Croix ». Il se souviendra peut-être de l’avertissement du Christ (Mt. 10, 22) « Vous serez haïs de tous à cause de mon Nom. »

Quant à nous, préférons cette béatitude, car c’en est une, au management de ma marque de fabrique.

Hugo Clémenti

 

Nous ne saurions trop recommander au lecteur de se reporter au texte de ce sermon, paru sur le site de l’Abbé Girouard : http://www.sacrificium.org/fr

On aura le texte exact de l’Abbé Girouard sur son site. Nous avons modifié le « style parlé ».

Yvon Pesqueux et Yvan Biefenot, L’éthique des affaires, management par les valeurs et responsabilité sociale, Edition d’organisation, 2002.

La stratégie des organisations, une synthèse. Les éditions Transcontinental Inc., 2000, p. 637

Hafsi, Kiggundu et Jorgensen sont des auteurs ayant écrits des articles auxquels cette citation fait allusion. Le chiffre entre parenthèses indique l’année de publication.

L’adage sartrien colle avec la réaction sans vergogne de Monsieur « sauve qui peut ! »

Peter Drucker, Managing for résults, 1964 et 1989,

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16 mars 2013 6 16 /03 /mars /2013 22:30

Mgr Fellay est-il bien placé pour juger
trois de ses prêtres? 

 

Trois prêtres de la FSSPX ont été identifiés par Menzingen comme étant les auteurs d’une lettre très ferme, mettant à jour les atermoiements, les contradictions, voire les mensonges proférés par Mgr Fellay au sujet de l’opération « ralliement » qui, a été, pour l’instant, réduite à néant par une opération « dissuasion » concoctée en hâte au Vatican.

Ces trois prêtres sont accusés de désobéissance grave, voire de sédition contre le Supérieur général et doivent passer en « jugement ». Certes, dans la vie sacerdotale, plus encore que dans la vie civile, l’obéissance est une obligation morale à laquelle on s’engage devant Dieu. La désobéissance est donc un acte très grave.

Néanmoins, l’obéissance chrétienne ne peut pas être exigée de manière absolue quelles que soient les circonstances. Mgr Fellay peut-il prétendre à l’obéissance de ces prêtres ? Sa position de Supérieur Général suffit-elle à fonder en conscience l’obligation d’obéir ? En l’occurrence, nous ne le pensons pas. Mais que vaut notre opinion ? Avons-nous des raisons sérieuses pour soutenir ces prêtres et dénier à Mgr Fellay le droit de les juger ?

Pour répondre à cette question, il nous faut étudier ce qu’est l’autorité. L’obéissance correspond à l’autorité et ne peut avoir de sens qu’en correspondant à l’autorité. Essayons, dans un premier temps, de cerner le bien-fondé de l’autorité en général. Nous en apercevrons aussi les limites ; puis nous resituerons les faits en regardant d’un peu plus haut.

 

I. Définition de l’autorité.


Qu’est-ce que l’autorité ? Ce terme découle de deux mots latins : du verbe « augere » –qui veut dire « augmenter » ; et du substantif « auctor », qu’on traduit par « auteur » ou « créateur ». Par cette étymologie, on comprend que l’autorité de Dieu est absolue, car, d’une part, Il est l’auteur de toutes choses ; d’autre part, Il nous donne la vie naturelle et par sa Grâce, qui augmente les vertus, il nous élève à la vie surnaturelle.

Gardons-nous de définir l’autorité par ce qui n’en est qu’une contrefaçon. Ne disons jamais que l’autorité a pour finalité de réprimer les mauvais penchants de la race humaine. Le philosophe Hume pensait que l’autorité de l’Etat était faite pour éviter que les hommes ne finissent par s’entretuer. Une telle vision de l’autorité, basée sur la méfiance, est issue d’un pessimisme protestant pensant que, depuis le péché originel, plus rien de bon ne reste dans l’homme. Non seulement cette conception est fausse, mais elle est dangereuse car jusqu’où le supérieur doit-il pousser sa méfiance envers ses subordonnés ? Quel droit ne va-t-il pas s’octroyer afin de prévenir le mal ? Avec de telles idées, son penchant sera de gouverner par la contrainte. Or l’obéissance, la vraie, procède d’une obligation morale et se différencie donc de l’exécution d’un ordre dans la peur ou la contrainte. On le comprend mieux lorsqu’on examine les différents modes de gouvernement de Dieu selon les différents ordres de la Création.

 

II. L’autorité, fondée dans l’ordre naturel, y trouve aussi ses limites.

1 .Dieu conduit les êtres inanimés nécessairement vers leur fin par des lois physiques. Les êtres animés sans raison sont régis par leur instinct. L’homme, doué d’intelligence et de volonté libre, a été laissé « à son propre conseil » (Si. : 15, 14). Donc l'homme a été remis au gouvernement de sa propre raison. Est-ce à dire qu’aucun homme ne peut commander à aucun autre homme ? Répondre oui serait la première erreur sur l’autorité. Les révolutionnaires, certains philosophes et autres anarchistes « humanistes » pensent que toute hiérarchie est suspecte, sinon mauvaise. Ils dissolvent la notion d’autorité et ne trouvent plus de fondement pour l’obéissance. Or la révolution conduit au chaos.

 

2. Mais une autre erreur sur l’autorité engendrera une autre erreur sur l’obéissance. Un positivisme exagéré amène à concevoir l’autorité comme une « délégation », Dieu établissant certains hommes pour gouverner et d’autres pour obéir. Cette vision positiviste accorde à toute personne en position de chef un pouvoir illimité, parce qu’il est chef, indépendamment des contextes et des circonstances. Penser ainsi revient à mutiler l’autorité de sa nécessaire connexion avec l’ordre naturel qui reste la règle suprême. On opte alors pour une morale volontariste affirmant que le bien est dans la volonté du supérieur, l’inférieur devant faire abstraction de son intelligence et de sa volonté. Ce positivisme correspond assez bien au caractère germanique. Mais c’est une vision funeste, car là où cette délégation n’est pas précisée par Révélation divine immédiate, où donc l’autorité trouvera-t-elle ses limites ? Sera-t-il possible de distinguer entre le bien et l’arbitraire d’un homme ?

Toutefois, nous concédons que, pour le plus grand nombre, obéir aux autorités en place, de manière positiviste, est plus facile. Les hommes préfèrent les autorités constituées et sont naturellement portés à faire confiance. Cette opinion favorable pour la hiérarchie est même moralement hautement recommandée. Néanmoins, cette propension naturelle à suivre le chef ne donne pas la vérité sur l’autorité. Ce désir de pouvoir faire confiance doit donner à tout supérieur le souci de ne pas abuser les subordonnés.

 

3. Saint Thomas, Docteur commun de l’Eglise, nous fait découvrir le véritable fondement de l’autorité et de l’obéissance dans la nature sociale de l’homme (IIa, IIae, q. 104). Les hommes vivent en divers groupes où se réalise en commun un certain bien. L’ordre naturel étant la participation de la Loi Eternelle dans les choses créées, c’est véritablement fonder l’autorité sur Dieu que de la déduire des structures naturelles de la société. Tout le monde comprendra qu’un père de famille, de par l’ordre naturel, a autorité chez lui, mais non sur la famille de son voisin. Le roi David avait autorité sur son armée et dans son palais, mais n’avait pas autorité pour prendre l’épouse de son serviteur Uri. 

 

4. Autre point important : l’autorité est liée au gouvernement de la communauté. Mais elle n’a ni le pouvoir ni le droit de modifier les vérités naturelles spéculatives. Aucune autorité sur terre ne peut donner à l’erreur le moindre droit à l’existence. L'erreur «n'a objectivement aucun droit, ni à l'existence, ni à la propagande, ni à l'action» (Pie XII, Discours aux juristes catholiques italiens, 1953).  Aucune autorité, ni même le souverain pontife ne peut décider que ce qui est noir est blanc, que ce qui est mal est bien, que les fausses religions sont devenues bonnes, que s’éloigner de Dieu et de la doctrine du Christ est un bien.

5. Bien qu’étant une institution à vocation religieuse, et donc surnaturelle, la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X, n’échappe pas, du fait de sa composante humaine, à la règle naturelle. En conséquence, tout supérieur, dans l’exercice de ses fonctions, participe à l’autorité divine, mais cette autorité se limite au gouvernement de sa communauté. Toute autorité humaine porte sur un groupe et doit agir en fonction de son bien commun. Les limites du bien commun de ce groupe fixent les limites de l’autorité de son Supérieur. L’autorité du supérieur ne s’étend pas au bien commun d’autres groupes, ni à un groupe plus vaste au-dessus du sien. Par exemple, un préfet dont l’autorité s’étend à un département, n’a pas d’autorité à l’échelon mondial. Il n’a ni le pouvoir afférent ni le mandat nécessaire pour y prétendre. Son seul devoir est d’obéir aux préceptes venant de plus haut. Dire le contraire, reviendrait à nier toute hiérarchie.

 

6. a) L’autorité est ordonnée au bien. C’est pourquoi le chef d’une société de malfrats ne saurait revendiquer la moindre autorité, même sur ses complices. Pour ces sortes de sociétés, vivant aux dépens des autres, il n’existe aucun véritable bien commun. Car le bien commun d’un groupe n’est jamais compatible avec le péché. N’en déplaise à nos politiciens d’aujourd’hui, aucune autorité d’aucun groupe ne saurait licitement conduire au péché, ni favoriser le péché. La parole de Caïphe disant : « Il vaut mieux qu’un homme meure pour tout le peuple » (Jn. XVIII, 14) était prophétique, mais absolument immorale. Là n’était que l’intérêt et non le bien commun. Tout catholique sait qu’une loi immorale ne doit pas être suivie et qu’il faut lui résister.

b) Ordonnée au bien commun, l’autorité a pour rôle d’insérer l’individu dans la collaboration à un ordre plus grand que lui. Le bien commun, qui est le bien de tous, dépasse le bien d’un seul. Le gouvernement du Supérieur stimule et coordonne les activités des subordonnés vers l’édification de ce bien commun. Par sa soumission à l’autorité unifiante, chaque individu est grandi, augmenté (augere), il participe au bien commun qui s’édifie, se crée et se consolide (auctor). Donc, fondamentalement, l’autorité est aimable. Aller contre l’autorité défait l’ordre naturel et rend le monde invivable.

c) Le facteur caractéristique de cet ordre humain est le précepte. « Nous entendons par là une ordination impérative qui s’adresse à une intelligence et à une volonté. Le précepte n’agit pas du dehors, par contrainte ou influence physique, il s’adresse à une conscience. Il lui est essentiel d’être donné à quelqu’un qui en comprend la teneur et qui prendra librement sur soi de l’accomplir. Il reste donc parfaitement vrai que Dieu a remis l’homme entre les mains de son conseil ; bien loin de s’opposer à l’obéissance, c’est cette prérogative qui la rend possible » (R. P. M. M. Labourdette o.p. La vertu d’obéissance selon saint Thomas, in Revue Thomiste, octobre –décembre 1957, pp. 626-656).

d) L’obéissance demandera parfois beaucoup de courage et beaucoup d’abnégation au subordonné, mais le supérieur reste également responsable de son autorité. Le détenteur de l’autorité est responsable et doit répondre de ses actes comme de la qualité de son commandement. Il doit veiller à ne pas rendre son autorité problématique ou douteuse, à ne pas rendre l’obéissance plus difficile qu’elle ne doit l’être. Par-dessus tout, il s’interdira de sortir de son mandat qui est de conduire ses subordonnés vers le bien commun de son groupe.


III. Le bien commun de la Fraternité.


a) Quel est donc le bien commun de la Fraternité Saint Pie X ? Nul besoin d’en être membre pour répondre. Le Christ, singulièrement l’Eucharistie, est le bien commun de toute la chrétienté. La Fraternité a pour mission de donner des prêtres à l’Eglise, afin qu’ils donnent aux fidèles le Christ, gage de Vie Eternelle. Donc, ses séminaires et ses prêtres constituent le cœur du bien commun de la Fraternité, tout comme les enfants sont le bien commun d’une famille.

b) Le bien commun de la Fraternité a ceci de particulier que les prêtres qu’elle forme doivent être d’esprit traditionnel, sans compromission avec le modernisme qui ravage actuellement l’Eglise. Ainsi, en a décidé son fondateur Mgr Marcel Lefebvre. C’est pourquoi le serment antimoderniste rendu obligatoire sous Saint Pie X a été conservé dans la Fraternité, alors que l’Eglise, d’esprit moderniste, l’a supprimé.

d) Il faut ajouter au bien commun de la Fraternité l’esprit qui la spécifie, qui lui donne sa forme : sa résistance aux erreurs du Concile Vatican II, erreurs se traduisant particulièrement dans la liberté religieuse, l’œcuménisme et la collégialité. Cette résistance ne fait pas de la Fraternité un groupe coupé de l’Eglise, retranché du Corps mystique du Christ, au contraire. L’appartenance au Corps Mystique du Christ dépend des vérités à connaître, des sacrements à recevoir et des commandements à pratiquer. Parmi ces commandements, il y a certes l’obéissance au Pape et aux autorités de l’Eglise. Mais cette obéissance elle-même est réglée sur la foi. En cas de divergences entre la Foi et les autorités de l’Eglise, il faut conserver la Foi. « Mieux vaut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (saint Pierre, Actes 4:19). Il est impossible d’obéir à Dieu en obéissant aux hommes dès lors qu’ils sont éloignés de Dieu et se sont faits ennemis de sa doctrine. Nos désobéissances au modernisme obéissent à Dieu.

e) Au fil des rencontres avec Rome, Mgr Lefebvre s’est rendu compte du fait que les référents des hommes du Vatican s’étaient éloignés de la doctrine au point d’être devenus incompatibles avec la Tradition séculaire de l’Eglise : Mgr Lefebvre déclarait à la revue Fideliter n°79, p. 4 

« Fideliter : Pensez-vous que la situation se soit encore dégradée depuis que vous aviez – avant les sacres – engagé des conversations qui avaient abouti à la rédaction du protocole du 5 mai 1988 ? Monseigneur Lefebvre : Oh oui ! Par exemple -la profession de foi qui est maintenant réclamée par le Cardinal Ratzinger depuis le début de l'année 1989. C’est un fait très grave. Car il demande à tous ceux qui se sont ralliés ou qui pourraient le faire de faire une profession de foi dans les documents du Concile et dans les réformes postconciliaires. Pour nous c'est impossible ».

f) Tel est le patrimoine spirituel laissé à la FSSPX par son fondateur. La conservation de ce bien commun implique évidemment qu’on s’oppose à la Rome d’esprit conciliaire et que les prêtres expliquent aux fidèles la vérité s’opposant à ces erreurs. Jusqu’ici, Rome n’a eu de cesse de vouloir amener aux principes du concile Vatican II les prêtres fidèles à la Tradition. Au fil des ans, l’expérience de la Fraternité depuis sa création en novembre 1970, a montré qu’une collaboration avec cette Rome imbue de l’esprit du Concile était impossible. Jusqu’ici, les prêtres ont victorieusement résisté à la tentation du ralliement, à quelques malheureuses exceptions près. Sans cet esprit animé par l’amour de la vérité et la beauté du Sacerdoce catholique, la Fraternité Saint Pie X n’existerait pas. Elle a reçu cet esprit de son fondateur. Mgr Marcel Lefebvre lui a légué sa grâce capitale. Tel est le cœur de son Bien commun.

 

IV. Examen des faits à la lumière des caractéristiques propres à toute autorité.

En œuvrant pour un ralliement par des contacts et des tractations dont le contenu restait secret, Mgr Fellay a voulu transformer le bien commun de la Fraternité. A preuve, la déclaration doctrinale en date du 15 avril 2012, publiée par lasapinière info puis relayée par les sites anti-accordistes, déclaration stipulant :

I. Nous promettons d’être toujours fidèles à l’Eglise catholique et au Pontife romain, son Pasteur suprême, Vicaire du Christ, successeur de Pierre et chef du Corps des évêques.

II. Nous déclarons accepter les enseignements du Magistère de l’Eglise en matière de foi et de morale, en donnant à chaque affirmation doctrinale le degré d’adhésion requis, selon la doctrine contenue dans le nº 25 de la Constitution dogmatique Lumen Gentium du Concile Vatican II.

Or, nous l’avons vu (cf. plus haut : III, 6, e, déclaration de Mgr Lefebvre à Fideliter N° 79), le bien commun spécifique de la Fraternité saint Pie X est incompatible avec l’acceptation de l’enseignement de la totalité du Magistère actuel en matière de foi et de morale. Le changement de contenu du bien commun de la Fraternité signifié par Mgr Fellay est considérable, car il faudrait revisiter toute l’expérience de la Fraternité depuis sa fondation. Il ne s’agit pas d’un simple ajout, d’une simple modification rendant plus explicite la signification de ce bien commun. Il s’agit d’une négation, d’une infirmation de la forme qui spécifie ce bien commun.

Porté à la position de Supérieur Général par l’acceptation de ce bien commun à défendre et à faire connaître, comment ce même Supérieur Général peut-il maintenant se prévaloir de sa position et de son autorité, pour aller contre ce bien commun ? Il s’agit là simplement d’un abus de pouvoir. A moins de dire que le bien commun ne sert à rien et qu’un Supérieur n’a pas à diriger son groupe selon le bien commun, ce comportement est inacceptable.

b. S’agissant du secret entretenu autour des négociations avec Rome, secret heureusement brisé par la publication de la lettre de protestation des trois autres évêques et de la réponse de Mgr Fellay, nous voyons que cette attitude disconvient gravement à l’obligation de respecter le précepte d’une autorité s’adressant à l’intelligence et à la volonté des subordonnés. Car, nous l’avons vu (cf. plus haut II, 6, c) l’obéissance chrétienne ne peut s’assimiler à celle de brutes sans raison, suivant aveuglément des ordres donnés quels qu’ils soient.

c. Mgr Fellay peut-il prétendre à l’obéissance en prescrivant l’acceptation du Magistère post conciliaire ? Non, dans la mesure où ce magistère charrie des erreurs contre la Foi. Personne n’a d’autorité pour obliger en conscience de mettre la Foi en danger. Personne n’a d’autorité pour obliger d’accepter la liberté religieuse, l’œcuménisme ou encore la collégialité. Personne n’a d’autorité pour obliger d’accepter la nouvelle forme ambigüe des sacrements, etc. Ces principes sont déjà des péchés contre le Foi ou bien des occasions de péchés. Aucune autorité d’aucun groupe ne saurait licitement conduire au péché, ni favoriser le péché. (cf. plus haut : II,6, a.) En voulant faire ainsi, Mgr Fellay commet un très grave abus de droit, violant les consciences.

d. En ce qui concerne l’argumentation consistant à dire que Rome a changé, les faits prouvent qu’il n’en est rien. Sinon, Rome aurait accepté les offres de Mgr Fellay sans même exiger de sa part la ratification de tout le magistère postconciliaire. Mais Rome n’a pas changé. User de son autorité pour dire le contraire, c’est vouloir étendre l’autorité à une chimérique possibilité de changer les vérités spéculatives. (cf. plus haut : II, 4). On ne peut changer un mal en bien, c’est hors de portée des forces humaines.

e. Mgr Fellay a lui-même admis que la recherche d’une prélature auprès de Rome risquait de porter tort au bien commun de la Fraternité. Il s’est donc désolidarisé de sa fonction qui, en tant que Supérieur général, est de conforter, confirmer ce bien commun. Il a donc agi en dehors de tout mandat ; en dehors de toute légitimité (cf. plus haut : II., 5.).

On pourra objecter que le bien commun d’un groupe évolue dans le temps. Mais, si évolution il y a, il convient de regarder plus haut : qu’est-ce qui fonde le bien commun de la Fraternité si ce n’est le Sacerdoce ? (cf. plus haut : III. a, b.). Or, les réformes conciliaires renforcent-elles la conception du Sacerdoce, à travers la collégialité, dans la célébration de la nouvelle Messe dont le prêtre n’est que le président de l’action liturgique ? Evidemment non. 

f. Par ses dires ou ses non-dits et par ses actes, Mgr Fellay a provoqué une déchirure au sein de la Fraternité. Or, le propre d’un gouvernement conduisant les subordonnés vers le bien commun est d’unifier les cœurs et les actes de chacun (cf. plus haut : II, 6. b). Le fait qu’il persiste dans cette attitude en qualifiant de désobéissance coupable la contestation publique de son désir de ralliement, indique qu’il n’entend pas prendre en compte cette déchirure et qu’il ne veut pas ou ne sait pas que sa fonction lui commande de viser au bien commun. Il ne prend pas ou ne mesure pas ses responsabilités (cf. plus haut : II,  6.d.). Prendre des mesures de rétorsion contre ceux qui contestent son autorité, c’est construire un rapport de forces censé justifier l’injustice.

g. Quant à l’argument consistant à dire que le bien commun de toute l’Eglise l’emporte sur le bien particulier de la Fraternité, cette considération est juste en soi. Toutefois, il n’est nullement prouvé que le fait que la Fraternité ait refusé jusqu’ici Vatican II soit nuisible au bien commun de l’Eglise. C’est le contraire qui est vrai (cf. plus haut : III, b, c, d.). On lèse l’Eglise par le péché contre la Foi. Mgr Lefebvre n’a jamais voulu autre chose que servir l’Eglise. C’est en restant ferme dans la Foi et en apprenant à ses prêtres à conserver intégrale la Foi catholique qu’il servait l’Eglise du Christ. En s’occupant faussement d’un bien commun au-dessus de celui propre à la Fraternité, Mgr Fellay a banalisé l’erreur, accusant certains membres de la Fraternité de tomber dans l’exagération quand ils n’exagéraient rien. Ce faisant, il a compromis le bien commun de la communauté qu’il dirige comme celui de l’Eglise tout entière.

h. Enfin, hors de la Fraternité, la déchirure entre les prêtres s’est naturellement prolongée parmi les fidèles. Beaucoup d’entre eux ont œuvré pour l’essor des prieurés et des chapelles, donnant de leur personne et de leurs biens. Certains ont même confié leurs enfants qui sont devenus prêtres, frères ou sœurs dans la Fraternité ou dans certaines communautés amies. Ils l’ont fait en connaissance de cause et très consciemment pour contrer la contamination du modernisme et donner ainsi au Seigneur des enfants intégralement catholiques. Les prêtres, prêchant dans ce sens, ont exhorté les parents à veiller sur la foi de leurs enfants en les confiant à la Fraternité et non ailleurs. Les prêtres n’ont jamais dit : « confiez vos enfants aux communautés Ecclesia Dei ». S’ils l’avaient dit, les fidèles n’auraient pas compris.

C’est donc avec stupeur que ces parents ont appris que la recherche d’une prélature personnelle par Mgr Fellay primait sur tout le reste. Les enfants confiés à la Fraternité, aujourd’hui devenus prêtres, frères ou sœurs ; les enfants confiés aux communautés amies acceptant le revirement de Mgr Fellay, sont maintenant mentalement prêts à se plier aux «  enseignements du Magistère de l’Eglise en matière de foi et de morale » (cf. déclaration doctrinale) tout comme Mgr Fellay. Certains parents ont bien essayé de dire : « Mon enfant, à quoi dois-tu ta vocation, si ce n’est à l’enseignement de la foi intégrale et inchangée ? Si nous t’avions laissé en contact avec les enseignements du magistère après Vatican II, aurais-tu jamais eu la vocation en allant à la messe là où l’on bat des mains, où l’on prend le Corps du Christ avec ses doigts, dans ces églises où il n’y a plus de confessionnaux ? » Mais parfois, rien n’y fait. La déchirure s’est propagée jusque dans les familles, les parents se sachant spirituellement coupés des enfants qu’ils avaient confiés à la Fraternité.

Nous savons que cela importera très peu à certains. Pour d’autres, il y a une ignoble tromperie. Mais ces derniers offrent tout cela au bon Dieu.

C’est pourquoi ces fidèles, avec beaucoup d’autres, soutiennent de tout cœur les prêtres de la Fraternité saint Pie X. lorsqu’ils dénoncent publiquement les errements de Mgr Fellay. Il n’y a dans ce soutien rien d’autre que ce qui animait déjà ces mêmes parents : l’amour de la sainte Messe, l’amour de l’Eglise, la vénération et la reconnaissance débordante de leur cœur pour la Miséricorde divine prodiguée à travers les sacrements, l’amour des âmes et l’amour du Christ Roi. Ils espèrent que leur soutien pourra au moins égaler celui qu’ils fournissaient quelques années auparavant à la Fraternité de Mgr Lefebvre.

 

Conclusion


Parmi la foule des causes possibles d’une telle situation, il y a cette vision positiviste qui accorde à toute personne en position de chef un pouvoir illimité, parce qu’il est chef, indépendamment des contextes et des circonstances. Penser ainsi revient à mutiler l’autorité de sa nécessaire connexion avec l’ordre naturel qui reste la règle suprême (cf. plus haut : II, 2). Cette illusion positiviste peut expliquer, en partie, le fait que les prêtres courageux, exprimant leur désaccord, ne soient encore largement majoritaires. Mais nous reconnaissons que ceux qui restent silencieux peuvent aussi avoir des raisons très pertinentes. Le temps dira ce qu’il en est. 

En définitive, dans la situation actuelle, la morale est gravement lésée, car l’autorité a une très grande importance. La nier est un principe révolutionnaire. Mais la déformer, la contrefaire par la construction d’un rapport de forces misérable et injuste, après avoir méprisé le bien commun de sa communauté, est objectivement une négation de l’ordre moral, une contribution à la révolution. Le jugement que prononcera Mgr Fellay contre ces prêtres, risque d’ajouter à l’immoralité. Prions pour qu’il n’en soit pas ainsi.

  Celine MUHGOT et Hugo CLEMENTI

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21 janvier 2013 1 21 /01 /janvier /2013 22:50

 

La lettre de Mgr A. Di Noïa aux prêtres de la FSSPX est dans la presse ! Publiée par le site du Vatican. ! Le prélat recommande pourtant dans cette même lettre de ne pas s’adresser aux médias pour traiter des rapports entre la Fraternité et Rome.

Cette mise au grand jour va heureusement nous permettre d’analyser les méthodes de Mgr di Noïa. A première vue ce prélat n’a rien d’un iceberg. De mine plutôt affable, c’est néanmoins un américain comportementaliste, qui utilise les méthodes des psychologues et sociologues américains pour mener les tractations et les discussions difficiles.

Qu’est-ce que le comportementalisme ? Cet important courant regroupe nombre des behaviouristes, des psychosociologues, universitaires ou non, (Elton Mayo, Blake et Mouton, Mc Gregor, Herzberg, etc.) qui ont décortiqué les phénomènes de relations dans diverses organisations. Très en vogue dans les milieux militaires et dans les entreprises, il occupe aujourd’hui une place incontournable. Sa caractéristique est de prendre en compte le comportement externe des individus indépendamment du contenu des rapports entre les hommes et de considérer ce comportement comme essentiel. On peut traiter ainsi de la relation humaine sans s’arrêter à la raison d’être de la relation. La spécificité est rangée au rang des variables accidentelles.

Un esprit thomiste, voit immédiatement l’inversion qui consiste à prendre l’accidentel, l’accessoire, i. e. le comportement, comme objet d’étude, tout en reléguant l’essentiel, i.e. le véritable contenu de la relation, comme une variable. Par exemple, on parle avec Rome sans aborder les questions doctrinales. Ces théories préconisent ainsi des méthodes pour entretenir des relations interpersonnelles ou de groupe à groupe «efficaces et productives».

Certes, tout n’est pas mauvais dans ces méthodes dont l’approche positiviste démontre parfois une certaine utilité. Mais elles deviennent insupportables lorsque le contexte et la vocation des groupes commandent de chercher une vérité plus haute que l’utilité et d’en vivre. Passe encore qu’on utilise cette méthode pour mener une réunion de production dans une entreprise agroalimentaire ou dans une industrie du textile. Mais le lecteur conviendra avec nous qu’on ne saurait la préconiser lorsqu’on aborde les enjeux spirituels et la question surnaturelle du Salut éternel.

Un des schémas emblématique du comportementalisme est celui qu’a proposé l’école de Palo Alto fondée par Gregory Bateson (1904-1980). Il y est dit, entre autres, que, en cas de difficultés bloquant la communication, il convient de monter au niveau supérieur, au niveau de la « métacommunication » qui consiste à communiquer sur sa communication. En refusant la « méta-communication », on risque de s’enliser dans le conflit. Cette méthode demande de mettre l’accent sur l’importance d’un accord, sur l’importance des attitudes et des procédures au détriment du contenu, de la raison d’être de la relation entre deux personnes.

 

Quoi qu’il en soit, Mgr di Noïa semble féru de méthodes comportementalistes s’attachant à l’extérieur et vidant la relation de son contenu substantiel. Il reprend sans doute l’approche Palo-altiste pour analyser les rapports entre le Vatican et Rome.

 

Il mentionne soigneusement les faits suivants :

1. Malgré le désir d’unité des deux parties, les relations n’ont pas été bonnes ; l’obstacle étant Vatican II.

2. Le prélat monte au niveau supérieur et communique sur la communication.

3. A ce niveau, il convient d’examiner le pourquoi des blocages et de proposer des moyens de les surmonter afin de prendre un nouveau départ.

Voici les passages de la lettre romaine correspondant à ces trois étapes :

1.) Première étape : le désir d’unité :

« C’est avec joie que j’ai appris la satisfaction que vous a donnée notre dernière déclaration en date du 28 octobre. Il était important d’affirmer de manière publique et autorisée que les relations du Saint Siège avec la Fraternité sacerdotale saint Pie X restent ouvertes »

Et plus bas :

« L’Apôtre Paul nous invite à garder l’unité de l’Eglise, l’unité qui est donnée par l’Esprit et nous unit au Dieu unique « qui règne au-dessus de nous, par tous, et en tous » (Ep.4, 6). La véritable unité est un don de l’Esprit, et non le résultat de notre action. Toutefois, nos décisions et nos actions nous rendent aptes à coopérer dans l’unité de l’Esprit ou à agir contre les motivations de l’Esprit ».

Mais dans cette étape, on fait aussi état des blocages constatés. De manière insinuante le prélat note d’abord:

« Jusqu’ici, à part des décisions officielles, le saint Siège s’est, pour différentes raisons, abstenu de rectifier certaines affirmations inexactes au sujet de sa conduite et de sa compétence dans les relations. Quoi qu’il en soit, vient le moment où, dans l’intérêt de la vérité le Saint Siège sera obligé de faire état de certaines de ces indélicatesses ».

Plus bas, ce sont Mgr Fellay et les principaux artisans des tractations secrètes avec Rome qui sont visés. Surprenant ? Non, car il faut d’agir sur les protagonistes. Il est inutile de parler d’autres personnes, de celles qui n’ont pas voix au chapitre et qui n’ont aucune utilité.

« De récentes prises de position de membres de la Fraternité qui occupent d’importants postes d’autorité ne peuvent que faire douter de la possibilité effective d’une réconciliation. On pense en particulier à des entretiens accordés par le supérieur du district d’Allemagne (18 sept 2012) ; Par le premier assistant de la Fraternité (16 octobre 2012), ainsi qu’à un récent sermon du Supérieur général (1er novembre 2012) »

Ceci a pour but de mettre les futurs interlocuteurs en état d’infériorité en leur infligeant publiquement un camouflet, tandis que la presse, quasi unanime, chante « la main tendue » que le Pape offre une nouvelle fois à Mgr Fellay.

2.) Deuxième étape : Mgr di Noïa propose de monter au niveau de la « métacommunication ».

« Dans ces circonstances, tandis que l’espérance demeure, il est clair qu’un élément nouveau doit être introduit dans nos échanges, si nous ne voulons pas apparaître à l’Eglise, au grand public, et au fond à nous-mêmes, comme engagés dans un échange courtois, mais sans issue ni fruit. Il faut développer des considérations nouvelles, de nature plus spirituelle et théologique ; qui transcendent les désaccords importants et apparemment insurmontables sur l’autorité et l’interprétation du Concile Vatican II, objet de la division actuelle ; ces considérations seront centrées sur notre devoir de préserver et de chérir l’unité et la paix de l’Eglise, qui sont voulues par Dieu. »

3.) Troisième étape. Reste à voir ce que sont ces considérations nouvelles, susceptibles de surmonter l’obstacle.

Elles sont de deux sortes. La première consiste à pratiquer des vertus. Lesquelles sont expliquées, développées et répétées jusqu’à satiété tout au long de la lettre. Pour leur donner tout le poids requis et en faire une plateforme intangible, saint Paul, saint Thomas, le Saint Esprit et Dieu lui-même sont convoqués pour appuyer la proposition du prélat romain.

« Saint Saul nous dit : « Ayez beaucoup d’humilité, de douceur, de patience, supportez-vous les uns les autres avec amour. Ep. 4,2»

Pour Mgr di Noia, il est clair que ces quatre vertus incitent à laisser tomber les critiques. Mais si le besoin de critiquer persistait malgré tout « ce doit être avec charité, au bon moment et au bon endroit. »

Les considérations nouvelles seraient incomplètes si l’on en restait à la critique, même courtoise. Il faut étouffer la critique, c’est-à-dire vider la relation entre la Fraternité et Rome de son contenu, de sa raison d’être. Comment faudra-t-il s’y prendre ?

Premièrement en respectant le premier point exposant les conditions nouvelles à savoir : humilité, douceur, patience, amour. Si vous critiquez, faites-vous preuve d’humilité ? Faites-vous preuve de patience ? Ne pouviez-vous pas attendre encore un peu ? Comment pourrait-on croire à votre amour, alors que vous critiquez ?

Deuxièmement, s’il s’agit de points semblant difficiles à concilier avec l’enseignement du magistère, « ces questions théologiques ne devraient pas constituer le centre de votre prédication ou de votre formation ». Il ne faudra donc plus entretenir les fidèles des raisons pour lesquelles ils se trouvent dans des chapelles, pourquoi les églises leur dont refusées, pourquoi leurs pèlerinages ne sont plus soutenus que par la tradition, pourquoi les églises sont désertes, pourquoi les séminaires sont vides, pourquoi les vocations religieuses sont en chute libre. Non, sur les causes du désastre, motus. De même, les séminaristes n’auront pas à être instruits des raisons de la fondation du séminaire d’Ecône, alors que les autres séminaires diocésains restaient vides. Non, il ne faut rien en dire.

S’il s’agit du magistère actuel et de Vatican II, la FSSPX est avertie que c’est très « compliqué ».

« Ce fut une erreur de faire de tout point difficile de l’interprétation théologique de Vatican II la matière d’une controverse publique, cherchant à pousser ceux qui ne sont pas compétents en théologie à adopter notre point de vue au sujet de points théologiques délicats. »

Et encore :

« Un théologien ne présentera pas ses opinions ou ses hypothèses divergentes comme s’il s’agissait de conclusions indiscutables. Cette discrétion est commandée par le respect de la vérité ainsi que par le respect du peuple de Dieu (cf. Rom ; 14, 1-15 ; 1co8 ; 10, 23-33). Pour la même raison, le théologien renoncera à leur expression publique intempestive » (§ 27 du document Donum Veritatis, 1990)

 

Donc, la situation est claire. Pas de critique, mais seulement beaucoup d’humilité, de douceur, de patience et d’amour : pour l’unité. L’unité autour de quoi ? Autour de quelle foi ? Autour de la liberté religieuse ? Autour des JMJ ? Autour de l’Esprit d’Assise ? Ah ! Voilà bien des questions inconvenantes, sournoises et injurieuses, qui lacèrent le cœur du Christ, de l’Esprit Saint, de l’Eglise et des fidèles ! Honte à celui qui oserait les poser.

Conclusion :

Sur le plan de la communication, Mgr Fellay a commis plusieurs erreurs. En premier lieu en acceptant ou en proposant le secret. Car il s’est coupé par le fait même de l’ensemble des prêtres de la Fraternité. Or, l’homme a besoin d’information. Contrairement à quelques psychologues, nous tenons que l’homme est beaucoup plus tourné vers l’avenir que dominé par de prétendus refoulements hérités de son passé. D’où son important besoin d’information. Sans doute faudrait-il faire ici quelques distinctions, mais ce n’est pas notre sujet. Contentons-nous de dire : Une « bonne » information est vitale. Le secret engendre le doute, les dysfonctionnements. Ce fut donc la première faute. Sillonner ensuite la planète pour tenter de réparer ( ?) les causes du manque d’information est peine perdue. 

La deuxième faute est de s’exposer à être dépossédé de son rôle de Supérieur en se laissant manœuvrer par Mgr di Noia qui s’adresse directement à tous les prêtres. C’est un court-circuit magistral, montrant que Mgr di Noia est partout chez lui. Le court-circuit serait supportable s’il confortait Mgr Fellay. Au contraire, il l’esquinte, en se plaignant de son comportement. Pourquoi la lettre est-elle destinée aux prêtres et non pas uniquement au Supérieur si ce n’est pour ébranler la position de Menzingen ? N’est-ce pas aussi, parce que le Prélat romain est sûr que Mgr Fellay ne peut plus reculer ? D’où lui vient cette inquiétante assurance ? Mgr Fellay a-t-il encore les moyens de se retirer de ce guêpier ? La suite nous le dira. Dans tous les cas, la nocivité de la Rome conciliaire sera démontrée par les traces laissées sur le corps de la FSSPX.

Si vous n’êtes pas encore convaincus du fait que le comportementalisme est sans foi ni loi, vous n’avez qu’à attendre la suite des événements … Vous y verrez l’esprit de Palo Alto transformant le Saint Siège en Saint Piège. 

Hugo 

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10 septembre 2012 1 10 /09 /septembre /2012 15:33

Revenons sur le site d’Allemagne qui n’a jamais caché son ardeur à prôner la conclusion d’accords avec Rome en vue d’une reconnaissance canonique. Un texte, en particulier, retient notre attention : celui de l’interview de l’Abbé Schmidberger par le Journal Die Welt publiée sur internet. Nous laissons le lecteur germaniste ou germanisant se reporter à l’original allemand sur internet http://www.welt.de/print/die_welt/politik/article13865219/Gott-laesst-uns-nicht-fallen.html;

Nous donnons ci-après la traduction d’un passage qui nous a paru particulièrement important et nous le ferons suivre d’un bref commentaire.

Extrait de l’interview de l’abbé Schmidberger par le journal die Welt en date du 13/02.12

Welt Online: Le pape, il y a trois ans, a risqué sa bonne réputation et l'unité de l'Église pour aboutir à la réconciliation avec la Fraternité saint Pie X. De son côté, qu’est-ce que la Fraternité met à contribution pour se réconcilier avec le Pape et avec l’Eglise ? [1]

Abbé Franz Schmidberger : En cas de reconnaissance canonique, la fraternité apportera à l'Eglise un gros potentiel, une grande force de foi. Je ne vois pas beaucoup de communautés religieuses dont les convictions reflètent cette unité parfaite entre le dogme, la spiritualité et la liturgie et qui en vivent. Nous apportons avec nous un grand trésor : celui d’avoir, dès le départ, célébré exclusivement l’antique et splendide liturgie, dans tout son éclat de foi et de sainteté.[2]
En outre, la Fraternité saint Pie X sera, pour le pape, d’un grand secours
pour contrer partout en Europe des forces centrifuges, porteuses de schismes larvés-regardez par exemple l’Autriche. Récemment, un archevêque Allemand m'a dit qu’on s’attendait, également en Allemagne, à ce que des communautés entières se séparent de l’Eglise.
[3] 

Welt on line : Là n’était pas ma question. J’ai fait mention de ce que le Pape avait risqué pour la réconciliation. Encore une fois, je voudrais savoir ce que vous, vous êtes prêt à mettre en jeu ?[4]
Abbé Franz Schmidberger : nous renoncerons à la relative liberté, avec laquelle nous avons jusqu’ici développé notre œuvre dans le monde, et nous la remettrons dans les mains du pape. En fait, il ne s’agit pas d’un accord diplomatique, mais du bien de l'Eglise et du salut des âmes. Pour l'Église, ce n'est pas la Fraternité saint Pie X qui pose problème ; ce sont les théologiens modernistes et l'effondrement progressif de la vie de l'Eglise depuis le Concile.[5]

Commentaire

Le premier passage que nous avons souligné prête le flanc à la critique, car plus d’un trouveront sa formulation quelque peu pharisaïque : « Je ne vois pas beaucoup de communautés … » Il eut mieux valu mentionner la grâce de Dieu ; c’eut été plus exact. Quant à l’affirmation : « La fraternité sera d’un grand secours pour le pape » ce ne peut être qu’une fiction délirante, car rien n’indique que le Pape veuille se faire aider pour redresser la barre. L’expérience passée incite plutôt à penser que l’intention du pape est de mettre ceux qui se réconcilient avec la Rome moderniste au diapason du modernisme. L’Abbé Schmidberger nous ressert ici la chanson des années soixante et soixante-dix : « le Pape est bon, mais son entourage est corrompu.

Enfin, nous restons bouche bée devant l’aveu que le journaliste arrive à arracher à l’Abbé Schmidberger : nous renoncerons à la relative liberté, avec laquelle nous avons jusqu’ici développé notre œuvre dans le monde, et nous la remettrons dans les mains du pape.

L’Abbé Franz Schmidberger s’exprime devant la presse comme si la décision de remettre la liberté de la FSSPX dans les mains du saint Père était connue de lui et dépendait de lui. Or, n’est-ce pas préjuger des négociations que d’affirmer : « nous remettrons notre liberté dans les mains du pape ». A tout le moins, n’est-ce pas une indication précieuse fournie gratuitement au Vatican que de s’exprimer ainsi ? Or, après avoir remis la liberté de la Fraternité aux mains du Pape, de quelle liberté la FSSPX pourrait-elle encore user pour ouvrir des écoles, fonder de nouveaux prieurés, voire organiser un pèlerinage ? En cas d’opposition de la part d’évêques, que devra faire la Fraternité, sachant que Benoît XVI était au Concile le plus intransigeant défenseur de la collégialité ? (Cf. Vatican II L’Eglise à la croisée des chemins, article : Joseph Ratzinger au concile, Tome I, Edition de MJCF, pp. 230-231). Passer outre ? Pour se faire rappeler à l’ordre et publiquement désavouer ? Improbable.

Quel est le vrai pilote du navire FSSPX ?

Réveillons-nous. ! Posons–nous la question : Qui dirige la Fraternité ? Quelques-uns penseront : Question saugrenue ! Et pourtant …
Dans tout l’article du journal die Welt, Mgr Fellay n’est mentionné qu’une seule fois ! Or, ne s’agit-il pas dans ce texte de l’état des tractations de la Fraternité avec Rome ? Voici la seule phrase où L’Abbé Schmidberger mentionne son supérieur :

Abbé Franz Schmidberger : Le 14 septembre 2011 le Cardinal Levada a transmis à Mgr Fellay, notre supérieur général, un préambule doctrinal» dont l’acceptation constituerait la condition préalable à l’obtention d’une reconnaissance canonique la FSSPX. Nous avons discuté le document romain en détail. Nous sommes arrivés à la conclusion, qu’en l’état, ce texte n’était pas acceptable.

Pour ma part, n’ai pas entendu que les supérieurs de districts aient été consultés. Peut-être l’ont-ils été ? Mais l’Abbé Schmidberger n’en fait nulle mention. Il raconte le fait comme si lui, et seulement lui, avait été appelé à discuter et à donner son avis. Il continue même en précisant :

"J’ai finalement porté moi-même à Rome le 1er décembre la réponse du supérieur général, qui, sur la demande du Vatican, l’a encore précisée"[6].

A l’évidence, le supérieur du district d’Allemagne s’exprime publiquement comme s'il était la Fraternité à lui tout seul. Aucun supérieur de district n’en fait autant. En revanche, Mgr Fellay a passé son temps à nous rappeler dans ses conférences ou dans ses sermons qu’il ne savait rien, qu’il ne pouvait rien dire. Curieux, non ? C’est pourquoi poser la question : « Qui dirige la Fraternité ? » n’est pas si saugrenu.

Céline Muhgot

 


[1] Welt Online: Der Papst hat für die Versöhnung mit der Priesterbruderschaft vor drei Jahren seinen guten Ruf (und die Einheit der Gesamtkirche) aufs Spiel gesetzt. Was setzt die Bruderschaft für die Versöhnung mit ihm und der Gesamtkirche ein?

[2] Pater Franz Schmidberger: Die Bruderschaft bringt, wenn sie kirchenrechtlich anerkannt wird, ein großes Glaubenspotenzial und eine große Glaubenskraft in den Innenraum der Kirche hinein. Ich sehe wenige kirchliche Gemeinschaften, die diese vollkommene Einheit zwischen Dogmatik, Spiritualität und Liturgie auf ihre Fahne geschrieben haben und leben. Wir bringen einen großen Schatz mit, denn wir haben von Anfang an ausschließlich die alte herrliche Liturgie mit ihrer Ausstrahlung des Glaubens und der Heiligkeit gefeiert.

[3] Außerdem wird die Piusbruderschaft für den Papst eine große Stütze sein, um das überall in Europa durch Zentrifugalkräfte latent vorhandene Schisma - siehe Österreich - zu überwinden. Erst vor kurzem sagte mir ein Erzbischof in Deutschland, man rechne auch hier mit dem Wegbrechen ganzer Gemeinschaften.

[4] Welt Online: Das war aber nicht meine Frage. Ich hatte daran erinnert, was der Papst für die Aussöhnung riskiert hat, und möchte also noch einmal wissen, was Sie dafür aufs Spiel setzen wollen?

[5] Pater Franz Schmidberger: Wir geben unsere relative Freiheit auf, die wir bisher eingesetzt haben zur weltweiten Ausbreitung unseres Werkes, und legen diese in die Hand des Papstes. Im Übrigen handelt es sich nicht um ein diplomatisches Abkommen, sondern um das Wohl der Kirche und das Heil der Seelen. Das Problem in der Kirche ist nicht die Piusbruderschaft, sondern modernistische Theologen und der fortschreitende Zusammenbruch des kirchlichen Lebens seit dem Konzil.

[6] Schließlich habe ich selbst am 1. Dezember die Antwort des Generaloberen nach Rom gebracht, und auf die römische Bitte hin hat er diese Antwort dann noch einmal präzisiert.

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25 juillet 2012 3 25 /07 /juillet /2012 21:31

Impression d'un laïc après le chapitre général de la FSSPX

La Fraternité Saint Pie X, déclare avoir retrouvé son unité. La rédaction du communiqué, rédigé au sortir du chapitre, laisse deviner que les parties en présence ont affirmé des points de vue qui pouvaient s’affronter : le texte reconnait d’un côté que le magistère suprême dans l’Eglise appartient au Saint-Siège : « le pouvoir suprême de gouvernement sur toute l’Eglise revient au pape seul, vicaire du Christ sur terre ; dans la royauté universelle de Notre Seigneur Jésus-Christ, créateur de l’ordre naturel et surnaturel, auquel tout homme et toute société doit se soumettre. »,  mais d’un autre côté on affirme : « Nous avons défini et approuvé des conditions nécessaires pour une éventuelle normalisation canonique. Il a été établi que, dans ce cas, un chapitre extraordinaire délibératif serait convoqué auparavant. »

Un contraste frappant

Au lendemain de ce chapitre, on ne peut quand même pas s’empêcher de voir le contraste entre le site officiel français La Porte Latine voire le site de DICI où prévalent les communiqués officiels, et le site officiel allemand priesterbruderschaft puis x, débordant d’une exubérante activité, épinglant évêques déviants et théologiens en mal de vieilles nouveautés. Le malheur est que toute cette verve croie intelligent d’employer des arguments s’appuyant sur Vatican II. On y parle aussi de la reprise des pourparlers avec Rome, comme étant maintenant la grande affaire. Quel contraste avec le silence français !

La perspective d’un accord rendant la FSSPX dépendante d’un pape imbu (entre autres) de liberté religieuse et d’œcuménisme s’est-elle donc éloignée ? Pour un temps très court, peut-être. Le Saint-Esprit a fait son œuvre. Il a déchiré le filet de l’oiseleur et libéré nos âmes (ps. 123). Mais l’orage peut revenir. Il n’est pas loin. Les consignes de silence données un peu partout n’ont pas touché l’Allemagne.
Curieux … Le calme relatif sera de courte durée.

Origines vraisemblables de la crise

On ne peut s’empêcher de réfléchir aux raisons qui ont amené cette crise invraisemblable. Comment cela a-t-il été possible ? N’a-t-il pas fallu qu’on oublie les avertissements de Mgr Lefebvre contre le modernisme ? N’a-t-il pas fallu que certains commencent à penser comme on pense au Vatican ?

Mais, comment savoir ce que pense quelqu’un ? Sommes-nous, comme saint Dominique, doté du pouvoir surnaturel de lire dans les âmes ? Hélas, non ! Alors, lorsque nous écrivons « certains », qui voulons-nous désigner ?
Il suffit en fait de scruter les textes publiés ici et là pour déceler les germes d’une intoxication mentale déjà fort avancée. Force est de constater que les acteurs contaminés sont toujours en place et que le danger n’est que momentanément écarté. Voici les faits.

Le 20 juillet dernier, le site internet FSSPX du district d’Allemagne publie un article en forme d’avertissement contre le théologien Eberhard Schockenhoff qui milite pour que les divorcés remariés puissent communier. Il n’y a, jusque-là, rien qui n’indique une intoxication. Au contraire. Mais l’auteur de l’article en question ajoute des commentaires révélateurs. Selon lui, Schockenhoff et les autres théologiens du même acabit ne pourraient plus affirmer être « en pleine communion avec Rome »[1]

Une argumentation moderniste pour réfuter le modernisme ?

Nous récusons l’expression détestable : « être en pleine communion avec ». Elle revoie à la nouvelle ecclésiologie inaugurée au concile Vatican II selon laquelle l’Eglise serait à concevoir par degré de communion. Le degré maximal étant celui de Rome, pour décroître par cercles concentriques, jusqu’aux athées, jusqu’aux chrétiens qui s’ignorent, en passant par les orthodoxes, les protestants et les autres religions musulmanes ou bouddhistes. On savait, avant le concile, que la négation consciente et délibérée d’un seul dogme de la religion suffisait pour ne plus être catholique. Pourquoi cela ? Parce qu’on ne mélange pas son propre sentiment avec la Révélation. Si l’on ajuste sa foi selon son opinion personnelle, on ne croit plus que l’objet de la foi est la Révélation divine. Dans la religion catholique, l’objet de la foi vient de Dieu. Ce qui n’est pas de Dieu vient du démon. Si si ; non non ! C’est pourquoi il ne peut y avoir de degrés de communion. Mais, il n’en est plus ainsi aujourd’hui. Depuis Vatican II, on estime qu’il y a des semences du Verbe (semina verbi) dans les autres religions qui, loin d’être des obstacles à la seule vraie religion, sont autant de preuve que « l’expérience de Dieu » touche tous les peuples ; que l’Esprit Saint souffle également chez les moines tibétains, chez les anabaptistes ou chez les « adorateurs de l’œuf ». D’où le grand dogme de Vatican II, préconisant le dialogue interreligieux et la promotion incessante de l’œcuménisme en lieu et place de l’esprit missionnaire d’un saint François Xavier ou de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, patronne des missions. D’où les cérémonies de repentances répétitives de Jean Paul II devant les juifs ou devant les protestants. Les musulmans se sont réjouis de voir le même Jean Paul II embrasser le coran ; de même, ils n’ont pas boudé leur plaisir lorsque ce Pape a battu la couple de l’Eglise sur la poitrine de Godefroy de Bouillon ou de saint Louis, en déplorant les croisades et les guerres contre l’islam. Depuis Vatican II, on voudrait nous faire croire que l’Eglise n’est plus l’Eglise du Christ. On dit que l’Eglise du Christ subsiste dans l’Eglise catholique (subsistit in), mais que l’Eglise, au sens nouveau, s’étend à l’humanité entière.
Tel est le contexte idéologique de la locution bizarre « en pleine communion avec». Lorsqu’on l’emploie, on atteste son penchant à avaler d’un trait l’erreur conciliaire sur l’ecclésiologie.

Le rédacteur de l'article veut-il jouer au premier de la classe ?

Notre constat d’intoxication au sirop moderniste ne s’arrête pas là. Dans le même article, le pourfendeur du théologien Schockenhoff cite complaisamment Jean Paul II et le cardinal Ratzinger qui, effectivement, ont refusé qu’on donne la communion aux divorcés remariés. Puis, l’auteur précise que, pour pouvoir se dire catholique, il faut pleinement adhérer à l’entier du magistère suprême de l’Eglise dans ses écrits et dans ces actes[2]. Il n’écrit pas qu’il faut adhérer au « magistère constant », encore moins à la « Tradition multiséculaire de l’Eglise ». Non. Après avoir cité Jean Paul II et le Card. Ratzinger, il parle du magistère. Ce qui induit qu’il s’agit du magistère des Papes postconciliaires. Cela ne rappelle-t-il pas l’injonction de Benoist XVI faite à la Fraternité saint Pie X, de reconnaître le magistère actuel de l’Eglise et les réformes issues du concile Vatican II ?

On a du mal à croire qu’un tel texte puisse se trouver sur un site de la FSSPX, fût-il allemand. Car enfin, le rédacteur adhère-t-il à Benoît XVI lorsque ce Pape prie avec les musulmans dans les mosquées ? Lorsqu’il affirme et laisse répéter que les juifs n’ont pas besoin de se convertir ? Lorsqu’il nomme Mgr Müller préfet de la Congrégation de la Foi, alors que cet archevêque a nié dans ses livres la Transsubstantiation et a minimisé la réalité physique de la virginité de Notre Dame ? Accepte-t-il les propos du Card. Ratzinger expliquant à Mgr Lefebvre que l’Encyclique Quanta Cura ne pourrait plus avoir cours aujourd’hui ? Que le Concile Vatican II était une sorte de contre-Syllabus ? Soutient-il la position du Pape Benoit XVI déclarant que la doctrine sociale contient trois points « non négociables » qui sont la défense de la vie, la famille et l’éducation ? Alors, exit la doctrine sociale de l’Eglise affirmant que la séparation de l’Eglise et de l’Etat est peccamineuse ? Exit le Règne du Christ Roi ? Comment ne pas voir que, sans le Règne social du Christ, il est illusoire de vouloir défendre la vie contre l’avortement et l’euthanasie ; la famille contre les lois sur le divorce et l’homoparentalité ; l’éducation contre le laïcisme et les prétentions d’un Etat athée définissant les programmes et préconisant d’enseigner l’idéologie du « gender » ?

Conclusion

Sous couvert de prendre la défense de la doctrine de l’Eglise, l’auteur de l’article se déguise en auxiliaire de la police papale (ce dont le Vatican se moque éperdument), mais fait passer en contrebande les principaux thèmes mortifères de Vatican II.

A l’adresse des fins limiers allemands, pourfendeurs de tous les dangers modernistes, nous voudrions les prévenir charitablement qu’il ne leur sert à rien de produire l’argument de la « pleine communion avec le Saint Père » ni de produire les textes référencés à l’appui. Pourquoi ? Parce que le modernisme est tout sauf une doctrine. C’est une idéologie et comme toute idéologie, ses concepts sont des armes de guerre à géométrie variable. Pour eux, ce qui est vrai dans tel cas ne le sera pas dans tel autre. Ainsi « la pleine communion avec le saint Siège » n’est décidée que par le Saint Siège lui-même et non par les textes qui sont fait pour le public crédule.

Enfin, et ce sera ma conclusion, cet empressement à vouloir des pourparlers avec Rome semble surtout venir d’Allemagne. Et encore, pour être plus précis, d’une infime minorité parmi les dirigeants allemands de la FSSPX. Cela vaut-il la peine d’entraîner toute la Fraternité ? N’y-a-t-il pas là plus qu’un abus ?

Qu’en pense le responsable du site internet du district d’Allemagne ? Qu’en pense Monsieur l’Abbé Schmidberger, supérieur du district d’Allemagne ? Qu’en pense Monsieur l’Abbé Pfluger, ancien supérieur du district d’Allemagne et premier assistant de Mgr Fellay ?  Allons même plus loin : qu’en pense Mgr Fellay ?

Nous savons maintenant d’où nous est venue cette crise aussi dangereuse qu’invraisemblable. Elle est prête à revenir. Prions la Vierge Marie qui a vaincu toutes les hérésies.

Hugo Clementi


[1]Le texte allemand dit : “sie stehen nicht in voller Gemeinschaft mit Rom“. Ce qui veut bien dire  « ils ne sont plus en pleine communion avec Rome. »

[2] Man muss also Herrn Schockenhoff und den übrigen Theologen in Freiburg, Rottenburg und Köln klarmachen, dass sie sich vollumfänglich an das Lehramt der Kirche und die Entscheidungen aus Rom zu halten haben.“

Traduction : Nous sommes dans l’obligation de préciser, à l’adresse de Monsieur Schockenhoff et des autres théologiens de Fribourg, de Ratisbonne et de Cologne, qu’ils se doivent de suivre l’entier du Magistère de l’Eglise ainsi que toutes les décisions émanant de Rome.



  

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11 juillet 2012 3 11 /07 /juillet /2012 17:47

Rome à la pêche de la FSSPX ?

 

Les nouvelles nominations de Mgr Müller et de Mgr di Noia doivent-elles être interprétées comme un abandon par Benoît XVI de la politique de « réconciliation » entre la FSSPX et Rome ? Il est permis de ne pas le penser.

Certes, les propos abrupts de Mgr Müller le laisseraient supposer, mais la diplomatie n’est-elle pas faite de chaud et de froid ? Mgr Müller, c’est la douche glacée, Mgr di Noia est censé mettre l’eau à une température acceptable. C’est ce que nous écrivions récemment à un ami. Exemple :

 

« - L'Eglise est dans un état épouvantable », constate un participant au sortir d’une réunion tendue entre représentants du Vatican et représentants de la FSSPX
- « Aidez- moi! » fait répondre le pape par la voix mourante d'un cardinal "sympathisant".

-«  Leurs conditions sont inacceptables », déclare un autre à la sortie d'une nouvelle réunion marathon.  « Nous ne pouvons signer ».
- « Rappelez-nous le thomisme que nous avons oublié », fait répondre le Pape au détour d'un couloir par une éminence toute de pourpre vêtue.

-«  Rome cherche notre reddition et rien de plus », estime la FSSPX. « J’ai reçu une lettre m’enjoignant de signer des conditions inacceptables ».
- « J'ai vu le pape », assure un mystérieux interlocuteur au téléphone. « Ce n'est pas sa pensée. Ne tenez aucun compte de cet écrit » !

- Qui croire ? se demande Mgr Fellay.

Ce régime de négociation déteint sur le comportement :

Le 25 Juin, l’Abbé Thouvenot écrit de Menzingen que le dernier texte reçu de Rome est « clairement inacceptable ». De son côté, Mgr Fellay, le 29 juin confirme implicitement ce constat lors du sermon des ordinations 2012 dans lequel il explique : «  Nous sommes  revenus au point de départ. »

Quelques jours plus tard, l’Abbé Schmidberger confie au Frankfurter Allgemeine Zeitung « La nomination de Mgr di Noia est un signe très positif ».

 

Qui croire ? se demandent les fidèles, anxieux de savoir à quels prêtres ils pourront s’adresser après le 15 Août.

La technique du chaud et du froid équivaut, en diplomatie, peche-ne-haute-mer.jpg à la technique du pêcheur de gros poisson. On ferre, puis on laisse filer pour fatiguer le poisson, étant entendu que la finalité est de l'attraper, et non de le laisser à la mer. Tant qu'il remue, après avoir été ferré, on redonne du mou. Le poisson cherche à s'éloigner et se fatigue en tirant sur la ligne. Quand il reste inerte, c'est qu'il est mûr pour être hissé à bord et mis au saloir. Cette stratégie a failli réussir. Mais les bruits de scission de la Fraternité avaient alerté le Vatican : Une Prélature personnelle  pour moins de prêtres que n’en compte la Fraternité saint Pierre ? Non-sens ! Impossible ! Ce serait déconsidérer le Vatican.  Donc, envoi d’une lettre revenant au point de départ, remettant à plus tard la partie de pêche.

 

Comment reprendre cette pêche qui n’a rien de miraculeux ? La stratégie est toute tracée. Mgr di Noia en sera chargé. En bref, elle s’articule sur deux éléments  principaux :

1°) Réputer mineur, secondaire et pour tout dire subjectif le principal point de litige. Montrer beaucoup d’empathie. La partie adverse doit « se sentir comprise » et « respectée ».

2°) Souligner les dangers et la gravité des inconvénients qui résultent de cette désunion.

 

On peut alors négocier un accord pour faire cesser la dispute, en concédant au récalcitrant le droit de garder ses idées. C’est la vieille "technique de résolution des conflits ", initialisée par le psychologue Carl Rogers et mise au point par son disciple Elias Porter[1].

Ce qui donne : "Nous sommes en désaccord à cause de Vatican II. De ce fait, vous n’êtes plus en communion avec le saint Père. Vous êtes en position schismatique, vous ne pouvez plus vous prétendre catholiques. Nous vous laissons penser ce que vous voulez sur Vatican II, mais vous reconnaissez le magistère du Pape. En conséquence de quoi, vous bénéficiez d’une Prélature personnelle".

    Comme indice d’un tel scénario, nous nous reportons aux diverses déclarations officielles.

Concernant la nomination  de Mgr di Noia le Vatican déclare dans une communication en date du 26 juin,: « La nomination d'un haut prélat à ce poste est un signe de la sollicitude pastorale du Saint-Père pour les catholiques traditionalistes en communion avec le Saint-Siège et manifeste son grand  désir de réconcilier les communautés traditionalistes non encore unies  avec le siège de Pierre » Le même jour le « haut prélat » en question  confie à l’agence CNS « "It is possible to have theological disagreements while remaining in communion with the see of Peter," Ce qui veut dire : « Un désaccord théologique est possible sans que la communion avec le siège de Pierre en soit affectée

 

    D’une part, reste à sSaint-Corentin.jpgavoir comment le désaccord peut s’exprimer dans une Prélature personnelle, dépendant directement du pape .
Reste à savoir, d'autre part, si l’accord une fois signé, la procédure "diplomatique" s’arrête ou bien si elle continue, au motif que les points concédés ne l’étaient qu’à titre provisoire par l'effet de pure charité papale. Ceci, jusqu’à ce que le poisson, définitivement inerte, soit éventré, vidé et mis au saloir. (Cf. IBP)

 

    Hugo Clementi 

 



[1]Voir nos articles consacrés au « management » sur ce site, spécialement à Carl Rogers et à Elias Porter.

 

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5 juillet 2012 4 05 /07 /juillet /2012 20:21

 

Voici un bref écho de la conférence du 9 juin que l’Abbé Pfluger a donné devant les prêtres et les laïcs du prieuré de Fabrègues. Disons à la décharge de l’Abbé que sa tâche était loin d’être facile. Non que le public fut hostile. Inquiet simplement. Mais la difficulté pour le conférencier venu en porte-parole de Mgr Fellay tenait au fait que l’état d’avancement des discussions était secret et que leur issue s’avérait incertaine, voire problématique. Cela manquait indéniablement de concret.

 

Dans ces conditions, le principal obstacle était de savoir quoi dire. C’est pourquoi le plus gros de la conférence n’a consisté qu’à défendre la démarche de Mgr Fellay, sans la décrire, contre une opposition sans visage dont on rapportait des avis disparates sans queue ni tête. Nous avons néanmoins compris que l’Abbé Pfluger était contre les « opposants ». Vint ensuite le temps des questions. Comment essayer d’en savoir plus ?

Question : La situation a-t-elle changé ? Rome retourne-t-elle à la foi ?

L’Abbé se défend d’affirmer que c’est la fin de la crise. Mais il y a une situation nouvelle. Selon lui, entrer en discussion, accepter la reconnaissance n’est pas une question de foi. C’est une question de prudence. Il faut réfléchir sur le passé, le présent, prévoir les conséquences.

A noter cet argument de « la prudence » du supérieur général qu’on répétera plus d’une fois. L’argument est fort, car il sous-entend : vous n’avez rien à objecter, car la prudence ne concerne que celui qui doit décider, à savoir le supérieur général.
Afin d’y voir un peu plus clair, laissons pour un instant la relation que nous faisons de la conférence pour parler de cette éminente vertu. Essayons de la définir en peu de mots, même si elle mériterait d’être expliquée dans un gros livre.

De la prudence.

1°) La prudence est d’abord une vertu intellectuelle, et non une intuition. Encore moins une illumination, ni un « insight ».La prudence ne jaillit pas des obscurs replis de l’âme. Elle est fille de la raison.

2°) Cette vertu intellectuelle a pour vocation de diriger l’action dans le concret de situations particulières et donc contingentes. La prudence n’est pas faite pour remonter aux causes les plus hautes ; sa force abstractive est faite pour mesurer les moyens à mettre en œuvre pour atteindre un but qu’on s’est fixé antérieurement. La prudence est faite pour découvrir le meilleur chemin qui conduit au but. Elle ne découvre pas le but. Elle le poursuit.

 

3°) C’est l’une des quatre vertus cardinales. C’est donc une vertu morale au service du bien. L’intelligence et l’habileté au service du mal ne portent pas le nom de prudence mais de rouerie, d’astuce ou de roublardise.

Mais on le voit : la prudence éprouvera des difficultés à légitimer un changement de cap, sauf à invoquer des raisons plus hautes. Elle peinera à expliquer la substitution d’une nouvelle vocation à une autre. Par exemple, le président d’une ligue des pêcheurs à la ligne aura du mal à invoquer la prudence pour transformer son association en club de joueurs de boules. Sauf à justifier cette décision par une raison plus haute ; par exemple en invoquant l’intention du gouvernement d’interdire les pécheurs à la ligne pour des raisons d’écosystème.

La prudence est la première vertu d’un chef, d’un décideur, d’un supérieur. Mais elle n’est pas non plus un charisme auto-validant, conférant l’infaillibilité. On ne peut raisonner ainsi : la prudence est le propre du chef, donc ses décisions sont toujours bonnes. Il en est de la prudence comme de la grâce d’état. Certes, nous avons tous la grâce nécessaire à notre état. Mais accomplissons-nous toujours notre devoir ? Nous avons tous la prudence nécessaire pour poser des actes bons, conformes à notre vocation, car Dieu ne nous demande jamais ce qui est au-dessus de nos forces ; mais tous nos actes sont-ils bons ? La prudence ne peut donc pas être invoquée pour empêcher de juger les actes. Or, même s’il ne nous revient jamais de juger les personnes, nous avons parfois le devoir de nous interroger sur les actes.

Pour aller plus avant, il faudrait distinguer entre l’intention du sujet et la bonté objective de ses actes. Mais, puisque nous n’avons pas l’intention d’écrire un livre, terminons donc sur la prudence en disant que la sagesse catholique nous demande d’avoir toujours pour le chef un préjugé favorable. C’est ainsi et c’est bien ainsi. N’en déplaise aux défenseurs de l’égalité en droit de tous les hommes. Cette prétendue égalité n’est pas catholique.

 

Comment savoir ce qui, dans les discussions, est acquis et ce qui reste pendant ?

Vient la question : que se passera-t-il si nous sommes appelés à faire de nouvelles fondations ?

Réponse : Si des fidèles nous appellent pour faire de nouvelles fondations et que l’évêque local n’est pas d’accord, on verra, on se débrouillera. Ce qui doit changer, c’est la manière de s’adresser à Rome.

Cette réponse révèle que la question de l’exemption juridique, c’est-à-dire le droit de s’installer partout, sans permission préalable de l’Evêque du lieu a été abordée dans les discussions. Mais elle a été reliée à l’acceptation de Vatican II et à la diminution voire à l’interdiction de critique du magistère. Si le premier critère n’est pas fixé, l’autre ne l’est pas non plus. D’où le « on se débrouillera ».

L’acceptation du magistère est centrale. A la remarque d’un participant rappelant que le pape était au concile un des principaux théologiens modernistes, l’Abbé Pfluger répond : Croyez-vous que le Pape est Pape ?

Donc, l’acceptation du magistère semble déjà réglée.

Un participant dit essayer d’y voir clair. Il conclut son intervention en disant : Personnellement, ma boussole dans cette situation est Mgr Fellay, mais le Mgr Fellay de 2008. Il lit la lettre aux bienfaiteurs du 14 Avril 2008 où Mgr Fellay déclarait :

« Suite au Motu proprio sur la Messe, il ne resterait à notre Société qu’une seule chose à faire : « signer un accord avec Rome ». Malheureusement, quelques-uns de nos amis se sont laissés prendre à ce jeu d’illusions. […]  Rien n’a changé dans la volonté de Rome de poursuivre les orientations conciliaires […] Le principe fondamental qui dicte notre action est la conservation de la foi. […] Voici pourquoi la fraternité Saint Pie X ne peut pas « signer d’accord » […]  Il serait très imprudent  et précipité de se lancer inconsidérément dans la poursuite d’un accord pratique qui ne serait pas fondé sur les principes fondamentaux de l’Eglise, tout spécialement sur la foi. »

Signé  + Bernard Fellay. Menzingen, le 14 avril 2008

 

Réponse de l’Abbé Pfluger – « Et alors ? »

Il est vrai que 2008 n’est pas 2012 ! La prudence est dans la situation concrète de l’instant et non dans l’abstrait … Prudence, prudence, que de décisions ne pose-t-on pas en ton nom !

Il faut dire qu’il est tard et que tout le monde est fatigué.

Conclusions concernant les discussions.

Nous savons que tout est secret. Que tout dépend de la prudence du supérieur général. Dès lors pourquoi venir faire une conférence ?
Mais réfléchir et se poser des questions, est-ce un péché ? Réfléchissons donc à partir de notre maigre moisson. Nous pouvons déduire que les discussions ont abordé les questions suivantes : 

  • Droit de la FSSPX de conserver la liturgie traditionnelle, vraisemblablement accordé sous condition d’acceptation du reste, à savoir :
  • Acceptation du magistère du Pape par la FSSPX sans droit de critique.
  • Acceptation de Vatican II, avec droit de demander la bonne interprétation (et non plus de critiquer) de certains points sur lesquels le Pape admettrait une difficulté d’interprétation.
  • Exemption juridique (droit de la Fraternité à de nouvelles implantations sans permission préalable des évêques) très certainement abordée, mais question non conclue. Ce dernier point servant sans doute à Rome de curseur d’ajustement pour faire accepter le magistère.

Au total : une FSSPX côtoyant les dérives modernistes ? Dans l’ignorance où nous sommes restés, on ne peut qu’arrêter notre réflexion. Trop de choses tournent à l’invraisemblance.

Antoine-Marie Paganelli

 

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5 juillet 2012 4 05 /07 /juillet /2012 20:07

 

Le rôle de toutes les œuvres de la tradition :

Bannir l’erreur qui nous divise

 

Si nous voulons réfléchir, en tant que laïc, sur les tensions que subit actuellement la FSSPX et à travers elle, les œuvres  de la tradition catholique dans leurs couvents, leurs maisons religieuses, leurs instituts et leurs mouvements divers, il faut, en premier lieu, poser la question de la raison d’être de cette tradition. En second lieu, nous nous interrogerons sur les principaux paramètres  qui se sont dégagés dans les relations avec la Rome de Vatican II.

La raison d’être des œuvres de la tradition

 

La résistance catholique ne s’expliquerait en rien sans Vatican II. Ce concile et son cortège d’erreurs a motivé d’abord la réaction de Mgr Lefebvre, puis la sollicitation de quelques séminaristes qui ne supportaient plus la révolution dans l’Eglise, puis la fondation d’Ecône, puis la condamnation d’Ecône par les autorités conciliaires qui ne supportent pas la vérité, puis les fondations diverses de bénédictins, de capucins de dominicains et des dominicaines, d’écoles primaires et secondaires, puis les sacres de Juin 1988, puis les excommunications, et maintenant, le long ferraillage avec les autorités romaines. Il y a d’un côté les erreurs conciliaires et, de l’autre, la résistance.

 

Aucune résistance à l’erreur ne se conçoit sans attaque de l’erreur. La vocation profonde de la tradition dans toutes ses œuvres comporte la contestation radicale de l’erreur. Conscient que ce point peut déplaire à beaucoup, donnons quelques explications sur cet aspect capital.

Nombre de laïcs souhaiteraient pouvoir vivre en paix, aller à la messe le dimanche en famille sans avoir à se préoccuper des querelles qui les dépassent. Ce souhait est, en un sens, légitime. Le monde de la tradition ne s’est pas érigé petit à petit, durant quelque quarante années, pour entretenir des polémiques et des controverses continuelles. Il visait également et vise toujours la survie spirituelle des catholiques ; si bien que nombre de familles ont pu transmettre la foi dans un calme relatif.
Mais les choses sont ainsi faites que la résistance ne peut exister sans polémique et sans controverses. Cette résistance ne se limite pas aux erreurs de Vatican II. Elle s’étend aux erreurs intellectuelles du monde actuel, où les erreurs de Vatican II ont été puisées. Ces erreurs contaminent la vie quotidienne, tant sur l’Etat, que sur la famille, sur la propriété privée, sur les mœurs privées et publiques. Il est clair que l’enseignement catholique qui n’aborderait que le côté positif des choses serait insuffisant. Il est clair que sans un antidote puissant, nombre de jeunes issus des rangs catholiques subissent de plein fouet la subversion du monde et font naufrage sans laisser de trace. Exemple : Tel couple se marie. Les deux familles sont de la tradition. Ils sont jeunes, beaux, honnêtes, heureux. Lui, est technicien et travaille de nuit pour la télévision. Elle, doit également travailler pour compléter le salaire de son mari, insuffisant pour les loyers parisiens. L’euphorie des premiers mois une fois passée, cette vie contre-nature où ils ne se rencontrent qu’en week-end et certains matins pour se dire bonjour-au-revoir, finit par leur peser lourdement. Le ménage dure un peu moins de deux ans. Les familles sont consternées.  L’antidote est de faire comprendre aux jeunes les dangers qui attendent les âmes dans notre société faite pour déboussoler, où tout est organisé en dépit du bon sens. Devant ce constat critique, certains s’écrient ‘’ne découragez pas les jeunes !‘‘. Ce reproche adressé à la critique n’a  aucun sens. Il revient à envoyer nos enfants au casse-pipe sans armes et sans munitions.

Le prix de la Grâce, c’est le sang du Christ.

 

Une revue de la tradition s’alarmait de la mollesse de certains adolescents et plus qu’adolescents. Elle notait leur manque de conviction, elle imputait avec raison cette déliquescence précoce à une éducation trop molle. Cela est parfaitement vrai. Celui à qui tout est donné sans même qu’il ne le réclame, finit par ignorer le prix des choses, lequel se mesure dans l’effort. Mais allons plus loin : celui qui ignore ce contre quoi l’Eglise a dû toujours lutter et ce contre quoi elle doit continuer de lutter, ignore le prix de la Grâce, le prix de la Rédemption. Le prix de la Grâce se mesure dans le grand livre de la Croix.

C’est pourquoi le moderniste, inconscient (espérons-le), enlève l’aspect sacrificiel de la messe, préfère les célébrations bien fraternelles aux chemins de croix.

 

L’erreur n’a aucun droit : elle doit disparaitre.

Attardons-nous encore un instant sur cet aspect de la lutte, composante ontologique de l’organisme catholique. Tout se tient à un niveau de merveilleuse rigueur.

Encore une fois, en plus de la bonne doctrine à enseigner, il y a l’erreur dont il faut se préserver. Car l’erreur est occasion de péché. Historiquement, on la voit toujours au principe des grandes menaces contre la foi. Les conciles en témoignent. Car la vérité ne peut vivre avec l'erreur ni l'erreur avec la vérité. C’est impossible. N'en avons-nous pas tous les jours la preuve? On a dit que depuis Vatican II, l’Eglise ne voulait plus condamner. On s’aperçoit que, depuis Vatican II, elle condamne la Tradition. Si nous ne voulons pas détruirel'erreur, c'est elle qui voudra nous détruire.

 

L’erreur n’a aucun droit à l’existence. Certes, il ne s’agit pas de supprimer physiquement les suppôts de l’erreur. Mais il faut décrédibiliser l’erreur, lui enlever le masque d’autorité dont elle s’affuble. Il faut la combattre car elle peut corrompre tout ce qui ne la combat pas. Si on laisse une pomme pourrie dans un cageot, elle pourrit les pommes saines autour d’elle. L’erreur est une anomalie dont il faut s’occuper sans délais. Lorsqu’il y a une fuite d’eau, que faut-il faire en premier : essuyer l’eau sur le parquet ou bien aller vite fermer le compteur ? Lorsque je travaille dans une pièce la fenêtre ouverte, s’il survient un vent violent qui emporte mes papiers, dois-je d’abord courir après les papiers ou fermer la fenêtre ? Lorsqu’un homme est tenté par l’alcool, dois-je le sermonner ou bien dois-je d’abord éloigner la bouteille ? Lorsque les âmes sont principalement empoisonnées par l’erreur de la liberté religieuse, dois-je me contenter d’enseigner la doctrine, ou bien dois-je attaquer l’erreur ? La morale catholique nous enseigne qu’il faut fuir le péché et les occasions de péché. Même lorsque je n’adhère pas à l’erreur, si je ne la combat pas, celle-ci reste est occasion de péché pour moi ou pour les autres.

 

L’erreur dans les hautes sphères de l’Eglise.

A quoi sert de faire goûter les grandeurs et la beauté de notre religion, si je ne dis rien sur les cérémonies interreligieuses, si je ne dis rien sur le pape qui se recueille et prie dans les mosquées, si je ne dis rien sur Mgr Müller, Préfet de la Congrégation pour la Foi, nommé le 2 juillet en remplacement  du cardinal Levada. Or, ce nouveau préfet, gardien (?) de la foi, enseigne des hérésies.

 

Qui suis-je, moi, simple laïc du rang, pour accuser un archevêque d’hérésie ? Voici les     faits :

 

En 2002, les éditions st Ulrich (Ausburg) publient un ouvrage de Mgr Müller sur la messe. « Die Messe, Quelle des christlichen Lebens » (La messe, Source de vie chrétienne) L’évêque y déclare que l’utilisation des mots «corps et le sang » pour parler du sacrement de l’autel peut « prêter à confusion » si la chair et le sang sont considérés comme les composantes physiques et biologiques de l'homme Jésus. Il ne saurait non plus s’agir du corps transfiguré de Notre-Seigneur ressuscité. Sur sa lancée, l’ancien Evêque de Ratisbonne poursuit : « En fait, “corps et sang du Christ” ne désigne pas les éléments corporels de l’homme Jésus durant sa vie terrestre, ni même le corps transfiguré de Notre Seigneur ressuscité. Ici, les termes “corps et sang” expriment la présence du Christ, signifiée au moyen du pain et du vin. » Même un bon élève de la tradition, en quatrième année de catéchisme, serait capable de relever l’hérésie.

 

La sainte communion, c’est, pour Mgr Müller, « la communauté avec Jésus-Christ, procurée par le pain que nous mangeons et le vin que nous buvons. Déjà, dans le domaine de la relation personnelle, une lettre peut être un gage d’amitié. Elle peut montrer ou pour ainsi dire, incarner la sympathie qu’éprouve son auteur pour le destinataire. Ainsi, le corps et le sang deviennent « symboles de sa présence salvifique ».

On peut lire les autres hérésies de ce responsable de la doctrine pour la foi sur le site La porte latine citant une étude du district FSSPX d’Italie.

 

Combattre l’erreur n’est pas « le petit plus » de la tradition, par rapport aux catholiques issus de la tradition et reconnus par Rome. Combattre l’erreur fait partie intégrante de la foi et de l’apostolat.

 

Les paramètres en jeu dans les rencontres avec Rome.

 

Revenons maintenant aux questions préoccupantes, à savoir les tentatives de réconciliation avec Rome. Essayons de réfléchir sur les éléments principaux qui émergent des expériences de rapprochement. Il y a d’un côté la tradition avec ses principes et ses certitudes bi-millénaires. De l’autre côté, il y a Vatican II, avec son ouverture au monde et aux autres religions. Les rencontres avec les autorités actuelles de l’Eglise ne peuvent porter que sur une reconnaissance canonique assortie de certaines conditions, dont obligatoirement la dépendance de Rome. Parmi les nombreux statuts possibles proposés par le Vatican, on retrouve toujours les mêmes ingrédients :

-       On vous reconnaît sur la base de la réciprocité : vous reconnaissez Vatican II et le magistère actuel. On vous permet d’être bi-ritualiste. Romme peut intervenir dans le choix de vos supérieurs. Enfin vous dépendez des évêques diocésains pour toutes vos implantations.

 

-       On vous reconnaît avec une exemption juridique, c’est-à-dire que, sur le territoire de l’évêque, vous pouvez vous implantez où bon vous semble. Mais vous restez limités à un diocèse et vous reconnaissez Vatican II avec toute sa liturgie : vous devrez concélébrer pour les grandes occasions et vous reconnaissez le magistère actuel.

 

-       On vous reconnaît, mais, de votre côté, vous reconnaissez Vatican II interprété selon la tradition telle que la comprend le magistère actuel, et vous aurez l’exclusivité de la liturgie traditionnelle dans vos maisons (au moins pour un temps) ; mais vous n’aurez pas d’exemption juridique : vous dépendrez pour le reste des évêques diocésains.

 

-       La quatrième position n’existe pas pour l’instant. Ce serait : on vous reconnaît tel que vous êtes, vous avez le droit de combattre les erreurs de Vatican II, de critiquer le pape quand il prie dans une mosquée ou dans les temples protestants, quand il visite les synagogues et déclare ne pas vouloir convertir les juifs, parce qu’ils n’en ont pas besoin. Vous pourrez  démasquer les hérésies fleurissant à la tête de l’Eglise, jusque dans la     Congrégation pour Doctrine de la Foi. De plus, vous bénéficiez de l’exemption juridique, si bien que vous pourrez vous établir partout où bon vous semble sans permission préalable des évêques diocésains. Vous choisirez vous-même vos propres supérieurs.

 

Tout cela, le monde de la tradition l'a déjà, sauf la fameuse reconnaissance.  Pour q'elle soit accordée, il faudrait que l’erreur soit détruite. Cela peut arriver de deux manières : ou bien attendre, à l’abri de nos œuvres de tradition que l’Eglise conciliaire continue de s’autodétruire et, de chute des vocations en fermeture de séminaires, finisse par disparaître. Cette solution risque d’être longue. Que deviendront entretemps les âmes qui se perdront ?
Ou bien, attaquer l’erreur avec autant de vigueur que de charité, afin de hâter la décrédibilisassion des poncifs modernistes. Aider la reconquête de la foi par le travail de théologiens vraiment catholiques qui doivent à tout prix publier. Les laïcs pourront aider à la publication de leurs travaux. Cette deuxième solution aurait pour avantage de réveiller beaucoup d’âmes dans l’Eglise officielle. Elles s'en trouveraient mieux pour résister à l’asphyxie et se sauver. Cette solution est plus charitable que la première.

Delenda est Cartago. 

Voilà toute notre prière que nous présentaons à la très Sainte Vierge au moment où les prêtres de la Fraternité vont  réunir leur chapitre. Au moment où l’on parle de reconnaissance canonique, au moment où s'effrite l’esprit de lutte contre l’erreur, nous disons : la retraite n’est pas pour tout de suite. Il est même question de la supprimer. Le rôle de la tradition est de vaincre l’erreur. Il est sain de développer l’apostolat de la plume et de redoubler d’ardeur pédagogique dans les prêches aux laïcs avec la sainte liberté des enfants de Dieu. Les dominicains d’Avrillé et la Fraternité Saint Pie X ont déjà beaucoup publié[1]. Il suffit de consulter leur site internet. La lecture est essentielle. Mgr Lefebvre disait à ses séminaristes : si vous ne lisez pas, vous deviendrez des traîtres. ! Un dernier souhait : que les familles et les prêtres incitent les jeunes à se former sérieusement.

Confiant en Notre Dame, Reine du ciel, nous disons : Gaude, Maria virgo, cunctas haereses sola interemisti in universo mundo. Réjouissez-vous Marie, car vous seule avez vaincu toutes les hérésies !

Icres

 



[1]Le rôle de la revue : Le sel de la terre est capital. Celui du Courrier de Rome également.

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27 juin 2012 3 27 /06 /juin /2012 16:52
Réflexions et interrogations de laïcs

Mgr Fellay annonce son intention d’entretenir des relations avec Rome en vue d’une reconnaissance canonique de la Fraternité. Selon le Vatican, il s’agirait plutôt d’une réintégration dans l’Eglise, afin de parcourir un chemin jusqu’à la pleine communion avec le Saint Père après acceptation de Vatican II, même si subsisterait une possibilité de s’interroger sur une « bonne » interprétation des textes conciliaires.

Les sanctions et les exclusions de la Fraternité prouvent la fermeté du propos de Mgr Fellay. La résistance de certains prêtres prouve l’existence de la crise que traverse cette Fraternité.Le fait que Mgr Fellay ait déclaré irrecevables les dernières exigences du Vatican ne change que le calendrier, mais pas l'intention de fond.  

Les laïcs sont-ils concernés ?

En tant que laïcs, il semble de prime abord que  nous n’ayons pas à intervenir. La Fraternité n’est-elle pas avant tout une communauté de prêtres catholiques ? Ne sont-ils pas chez eux ? Lorsqu’une  personne, propriétaire de ses biens, décide d’ajouter ou de retrancher une aile à sa maison après avoir reçu son permis de construire ou de démolir, ne serait-il pas indiscret, voire inconvenant de lui dire ce qu’il conviendrait de faire selon nous et d’insister jusqu’à ce qu’elle se rende à nos vues ?

Donc, premier point : c’est aux prêtres et à eux seuls qu’il incombe de régler cette crise selon leurs statuts. Chaque laïc pourra sans doute avoir ses préférences, mais cela n’aura strictement aucun effet. Son seul devoir est de prier charitablement pour que tout se passe pour la plus grande Gloire de Dieu.

Pourtant, chacun le sait dans son for intérieur : on ne peut rester indifférent. Pourquoi ?  Parce que les prêtres eux-mêmes, quel que soit leur choix, nous demandent de rester calmes, de nous défier d’une surinformation qui pourrait résulter d’une trop grande fréquentation des sites internet. Quelle attente doit-on y voir, si ce n’est celle de l’obéissance qu’ils escomptent ? Donc, à un certain point de vue, les laïcs sont tout de même concernés.

Mais, chacun sait que l’obéissance, tout comme la liberté, se place au niveau des biens intermédiaires et n’a donc rien d’absolu. L’obéissance ne se place jamais au principe de la conduite humaine. Elle n’est jamais une fin en soi. Il faut donc essayer de raisonner au niveau des principes.

Rappels de quelques principes fondateurs

 

Lorsque fut condamnée la Fraternité Saint Pie X par Rome en 76 puis en 88, s’est posée, à la conscience des laïcs, la question de la validité du mandat que prétendait exercer cette fraternité mise au ban de l’Eglise conciliaire. Injustement, certes, mais néanmoins réellement mise au ban de l’Eglise. En quoi son action était-elle encore légitime ?

La réponse donnée, surtout après les sacres de 88, était la suivante : la Fraternité entend faire ce que l’Eglise a toujours fait. Son action est réglée par le bien et le salut des âmes, loi suprême de l’Eglise pouvant dans certains cas, suspendre toutes les autres lois. L’autorité de la Fraternité est celle d’une hiérarchie de suppléance. Elle n’a pas l’intention de remplacer la hiérarchie de l’Eglise officielle, parce qu’elle ne veut pas être schismatique. Elle n’exerce qu’une suppléance dans une situation de nécessité.

Voilà beaucoup de notions importantes qu’il nous faut reprendre.

Le salut des âmes est la loi qui s’impose à la Fraternité, car c’est la loi suprême qui s’impose à l’Eglise. Si l’on comprend bien, c’est la loi qui légitime l’action de la Fraternité.

En désobéissance officielle avec l’Eglise, l’action de la Fraternité continue d’être légitime de par le cas de nécessité où nous nous trouvons : les âmes se meurent faute de nourriture spirituelle, les séminaires se vident, les vocations sont en chute libre, les laïcs pratiquants sont tombés en France à quelque 2,5% (alors qu’ils étaient,  encore en 1975, à 25% environ). L’enseignement délivré dans les diocèses ne tient plus pour vrai que la religion catholique est la seule religion qui puisse sauver les hommes pécheurs (baisse ou disparition des confessions, cérémonies interreligieuses, etc.).De plus, la hiérarchie reste sourde aux appels de détresse que lancent encore quelques laïcs.

Enfin, troisième point, l’action de la Fraternité n’est pas schismatique, parce qu’elle ne le veut pas, ce qui en soit serait suffisant pour ne pas l’être (cf. Cajetan), mais aussi parce qu’elle ne conteste pas que les évêques sont réellement évêques de leur diocèse, même s’ils ne font pas leur travail d’évêques ; et que le pape est réellement Pape, même s’il ne fait plus son travail de pape lequel consiste à confirmer ses frères dans la Foi (visite de synagogues et de mosquées, rassemblements d’Assise, persécution de la Tradition ). Enfin troisième raison prouvant qu’il n’y a pas de schisme : la Fraternité n’a pas l’intention d’ériger une hiérarchie parallèle comme l’atteste le fait que les évêques sacrés en 88 n’ont pas le pouvoir hiérarchique d’évêque ni au sein de la Fraternité, ni à l’extérieur. Mgr Lefèvre disait qu’il n’avait nulle intention de remplacer les évêques diocésains  existants et qu’il faisait ses implantations simplement là ou l’appelaient les âmes.

Telle était la loi fondamentale de la Fraternité, non écrite sous forme juridique, mais très largement exprimée et largement connue.

En quoi consiste le changement de cap ?

Avec l’annonce d’une possible Prélature personnelle, les laïcs s’interrogent. La sollicitude pour le bien des âmes n’est-telle pas remplacée par la préoccupation légaliste de la discipline de l’Eglise ? Qu’en est-il  de la loi suprême du bien des âmes ? N’y a-t-il pas là un changement de cap ? Le cas de nécessité a-t-il disparu ? Le vrai catéchisme est-il  enseigné ? La liturgie exprimant la Foi traditionnelle est-elle  rétablie ? L’exégèse biblique a-t-elle repris son cours ? Inutile d’écrire un livre de plus pour répondre que la misère des diocèses est encore plus grande qu’en 1988, année des sacres. Du village où j’écris, le clergé conciliaire n’arrive à célébrer une messe qu’une fois … par an !

Les chipotages incessants des évêques pour accorder la messe de saint Pie X pourtant officiellement non interdite, les vexations, la méfiance vigilante des autorités de l’Eglise pour tout ce qui pourrait avoir le malheur de rappeler les temps d’avant le concile, les églises fermées devant les pèlerinages de la tradition, laissent mal augurer d’une normalisation souhaitée par Mgr. Fellay. Qu’en sera-t-il de la liberté d’aller s’implanter là où les âmes réclament la vraie Foi et les sacrements, c’est-à-dire là où le veut  la loi suprême de l’Eglise quand les évêques en place n’ont rien fait, ne font rien et ne veulent rien faire ? Qu’en sera-t-il de l’avenir d’une chapelle déjà ouverte,  quand l’ordinaire du lieu contestera le bien-fondé de son existence qu’il dira lui faire « une concurrence déplorable et dommageable » pour tous ? Nos évêques nous ont trop habitués aux chantages aux sacrements, aux bobards conciliaires décrétant dans nos chapelles les confessions illégales et donc nulles, les mariages illégaux et donc non valides, voire les communions sacrilèges, et j’en passe …

L’agir dans le contexte du cas de nécessité est proportionné aux besoins des âmes. Porté par cette loi suprême qui est une loi d’exception, cet agir est nécessairement différent de l’agir dans le cadre d’une prélature personnelle qui, par définition, ne peut s’opposer ni au pape  ni aux autres évêques. Inutile de faire semblant de croire le contraire.

En quoi les fidèles sont-ils concrètement concernés ?

Les premières victimes de ce changement de cap seront les prêtres fidèles et les fidèles abandonnés par les prêtres légalistes qui sous, les injonctions conciliaires, contesteront aux laïcs le droit de réclamer à l’Eglise ce qui leur est dû.
Que leur est -il dû ? Commençons par le plus simple et le plus concret, même si ce n'est pas le plus important et si cela concerne le passé. Il s'agit du respect de l’intention des donateurs dont l'Eglise s'est toujours prévalue. En effet, les dons accordés en règle générale à la Fraternité Saint Pie X ne l’ont pas été à la légère mais au contraire, en toute conscience et délibérément, parce que la Fraternité accomplissait ce que l’Eglise officielle lui interdisait, c’est-à-dire le sacerdoce catholique, nécessaire aux âmes. Ne pas donner à l'Eglise conciliaire et préférer la Fraternité, telle etait l'intention bien arrêtée des donateurs. Un changement de cap, à cet égard, équivaut à ne pas respecter leur intention. Nous demandons, sans trop d’illusions, à tous les prêtres légalistes d’examiner le nouveau droit canon en ses articles 121 et 122.

Can. 121 - S'il y a fusion d'ensembles de personnes ou de choses qui sont des personnes juridiques publiques pour n'en constituer qu'un seul jouissant lui-même de la personnalité juridique, cette nouvelle personne juridique acquiert les droits et les biens patrimoniaux des précédentes et reçoit les charges qui leur incombaient; mais surtout en ce qui concerne la destination des biens et l'accomplissement des charges, la volonté des fondateurs et des donateurs ainsi que les droits acquis devront être respectés.

Can. 122 - Si l'ensemble qui jouit de la personnalité juridique publique est divisé de telle sorte qu'une de ses parties est unie à une autre personne juridique, ou que la partie démembrée est érigée en une personne juridique distincte, l'autorité ecclésiastique compétente pour la division, en respectant avant tout tant la volonté des fondateurs et des donateurs que les droits acquis ainsi que les statuts approuvés, doit veiller, par elle-même ou par un exécuteur à ce que:

1  ce qui est commun et divisible soit partagé, biens, droits patrimoniaux, dettes et autres choses, entre les personnes juridiques concernées, selon une proportion équitable et juste, compte tenu de toutes les circonstances et nécessités de chacune;

2  l'usage et l'usufruit des biens communs qui ne sont pas divisibles reviennent à l'une et à l'autre des personnes juridiques, et que les charges qui grèvent ces biens incombent à chacune, selon aussi une proportion équitable et juste à définir.

Nous demandons à tous les tenants de la prélature personnelle, de nous dire la conduite qu’ils comptent adopter vis-à-vis de ces canons. Car ils s’imposeront nécessairement à eux dans la Prélature personnelle, puisque ladite Prélature n’existe que depuis le nouveau droit canon (1983). Allez-vous respecter ce droit canon, ou bien allez-vous tenir les articles 122 et 123 pour de la paille ?

Autres droits, les plus importants, que peuvent défendre les laïcs : réclamer, dans les limites du possible,  l’ouverture de nouveaux centres de culte pour enseigner le catéchisme, célébrer le Saint Sacrifice de la Messe et faire vivre la Sainte Liturgie, vraie prière du Christ et de son Eglise ; donner les vrais sacrements, prévenir les fidèles contre les erreurs de Vatican II, contre les fausses philosophies du monde actuel tel le bon pasteur voulant défendre ses brebis ; conserver inchangée la vraie Révélation tirée de l’Ecriture Sainte et de la Tradition. Les prêtres fidèles, nous le savons, entendront ce cri et répéteront le mot de saint Paul caritas urget nos. Car la déchristianisation ne fait que s'aggraver.

Alors, même si l’on ne conteste pas le fait qu’il revient en priorité aux prêtres de régler le problème présent, nous les supplions respectueusement de bien vouloir tenir compte de la situation des fidèles partout dans le monde. De grâce, prenez courage, ne faites pas semblant de croire qu'il n'y a plus lieu de faire état du cas de nécessité !  Nous faisons porter, pleins de confiance et de reconnaissance, notre prière par le Cœur Immaculé de la Vierge Marie et par le Cœur blessé de son Divin Fils.

L’équipe de l’ICRES au grand complet

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  • ICRES
  • La politique est refoulée par les mêmes causes qui ont éliminé la religion. Dès lors, que reste-il de la société ? La science ? Mais la science ne donne aucun sens aux actes humains. Il est urgent de retrouver la mémoire de ce que nous sommes
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La grande misère de l'ordre social est qu'il n'est ni profondément chrétien  ni réellement humain, mais uniquement technique et économique

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